EDIT 21/01/19 : NE/SO a reçu sa première étoile au Guide Michelin, bravo à Guillaume Sanchez !
Des tatouages, des fermentations et distillations en tous genres, et surtout du goût, du goût et du goût. Bienvenue dans l'univers de Guillaume Sanchez, dans son restaurant NESO.
On l'a connu dans Qui sera le meilleur pâtissier sur France 2, puis dans Top chef sur M6. Guillaume Sanchez se fait à chaque fois remarquer. Par son look tout d'abord - le monsieur arbore une collection impressionnante de tatouages jusque sur le visage - et surtout par ses réalisations qui bousculent les jurés. Avec sa nouvelle adresse gastronomique, le jeune chef entend bien faire bouger les lignes de la cuisine d'exception !
La façade du NESO ne paie pas de mine. Mais dans le coin, on est habitué Abri se trouvant à quelques dizaines de mètres de là! Noir et anthracite, une allure qui plairait à Pierre Soulage ! Pas de d'ostentations ici, juste une feuille A4 qui présente un aperçu du menu, sans prix dessus, comme chez le grands bijoutiers de la place Vendôme.
A l'intérieur, même topo. Sobriété et élégance. Les tables sont grandes et très espacées, tout est pensé pour un confort maximum.
Au programme ? Un menu dégustation en 7 services, seul le 6ème plat s'offre à un choix cruel : Lieu jaune ikijimé ou Agneau de la ferme de Clavisy. C'est décidé, j'ai choisi, en route pour l'aventure ! (t'as vu le suspense !)
Place à l'entrée : l'asperge, présentée par le maître des lieux en personne. Oui, une seule et unique asperge. La tête d'un côté avec du foie de cabillaud préparé "comme un jambon" et de l'autre, la tige taillée en fines tranchettes posées en rosace sur une burrata (tiens, il y avait longtemps!). Légèrement croquantes, les tranches sont peu goûteuses seules et leur salut vient des petits morceaux d'olives déshydratées en dessous. La burrata apporte la gourmandise. Le goût répond plus présent du côté de la tête. Le tout reste de l'orfèvrerie tant par l'allure que par la délicatesse des saveurs dégagées.
Place à la langoustine. Servie avec des topinambours d'octobre 2017. Ha oui, on ne vous a pas dit, mais ici, les légumes fermentés ont des millésimes comme les grands vins ! Au dessus, une quenelle de caviar et une émulsion goûteuse. Tel un petit bonbon, la tête de la bête est servie à part, à sucer évidemment. Le résultat pulse fort ! Le goût de la bête est sublimé avec les oeufs d'esturgeon qui apporte une belle salinité. On gobe un peu de mer avec ce plat. Le topinambour fermenté apporte un peu de matière et une pointe d'acidité. Ce sont des goûts peu commun en cuisine.
Cette fois-ci, Guillaume Sanchez m'invite à boire un verre mystérieux. A l'intérieur, un liquide limpide. En bouche, une cascade d'iode ! C'est un distillat de vapeur d'oursins ! Un peu fou à l'image du chef, mais incroyable sur la langue. Dans le bol devant moi, 3 belles ravioles de homard avec un bouillon homard et oursins d'une rare puissance. On se rend vite compte que la cuisine du chef reste longtemps en bouche, les saveurs sont longues et profondes. Ici, on ne badine pas avec de la dentelle, on joue avec des goûts puissants et des saveurs complexes!
La carotte est ensuite à l'honneur. Cette fois-ci le légume frais est arrangé avec des congénères fermentés d'août 2017. Enfin, je parle de légume, mais ce plat fait ressortir d'une manière étonnante le côté sucré du tubercule ! La méthode de cuisson peu commune (en concentration d'eau de pommes de terre) s'avère loin d'être un artifice tout comme la lavande. C'est puissant, long en bouche et sucré... si bien qu'on a un peu l'impression d'avoir affaire avec un dessert !
C'est ensuite un plat audacieux qui arrive. Dans une assiette, une sardine qui semble avoir vécu. Un tâche verte et une quenelle de crème. En fait, le poisson a été fermenté comme on sait le faire en Suède, puis, conservée dans l'huile pour apporter un côté confit. Les chair se délitent évidemment. C'est fondant, et une nouvelle fois le goût envahit le palais. La sauce apaise, tandis que l'exceptionnel (l'incroyable, le sublime, le magnifique....) beurre au thym servi avec emmène le tout dans une autre aire sitôt avalé sur un bout de pain ! Ca envoie du lourd.
Fin du suspense que je sais insoutenable ! C'est donc vers le mignon agneau que je me suis tourné. Et là, autant vous dire que je ne me suis pas trompé, puisque j'ai pu goûté le meilleur agneau de ma vie ! Il relaye en deuxième position celui dégusté chez Pertinence (Paris 7), c'est dire ! Du délire. Cuit parfaitement, accompagné d'un jus puissant, c'est juste fou. Ce plat est accompagné d'un distillat de vin qui se marie à merveille avec le tout. Gourmand, délicieux, ce plat fait partie des grands moments d'émotions que j'ai pu ressentir à table. Pour tout vous dire, j'ai presque eu les larmes aux yeux. Ancré à jamais dans ma mémoire!
C'est donc l'heure du dessert. Celui qui s'est fait connaître plutôt en pâtissier apporte donc son bébé : lait cru et oeuf fermier. Oui, un oeuf, au jaune coulant en guise de dessert ! Il fallait oser, et Guillaume Sanchez l'a fait ! Mais ici, on retrouve les marqueurs de la crème aux oeuf caramélisée : le jaune d'oeuf est cuit au sucre, sous le blanc manger léger, une quenelle de glace au lait et tout en dessous une confiture de lait pour la note sucrée. La tuile? Faite en protéine de lait ! C'est parfait. Etonnant et pourtant réconfortant.
Pour terminer, un mystérieux coffre cache de jolies gourmandises : une pâte de fruit (oui bon...), une guimauve (mouai...) et surtout un nougat aux amandes sauvages incroyable ! J'ai hésité à dévorer tous ces petits cubes aux amandes délicieux, mais j'ai su me tenir ! Ma balance me remercie !
Alors, à combien on s'en sort dans cet établissement haut de gamme? 90 euros TTC le menu ! Gentiment, la bouteille de Badoit m'a été offerte, ça fait toujours plaisir. Et d'ailleurs, le plaisir semble le leitmotiv de NESO qui vaut amplement l'aventure !
Un coup d'oeil rapide jeté dans le bottin des vins m'a permis de voir de jolies références en biodynamie et nature à des prix très raisonnables ! De nombreuses nouveautés sont prévues dans ce restaurant (comme un labo test pour goûter les créations du chef!) qui ne fait que débuter son aventure et qui devrait passer assez rapidement par la case macaron Michelin, en tout cas, ça le mérite !
EDIT : J'ai vu que l'émission Très Très Bon de Paris Première a délivré la note maximale à NESO, on est d'accord !
NE/SO
6, rue Papillon
75009 Paris (métro Poissonnière)
Les + :
_ une cuisine inventive
_ des goûts incroyables
_ coup de coeur total pour les carottes et surtout l'agneau (mais aussi le beurre au thym) (et aussi la langoustine)
_ un décor très élégant, et un service soigné sans être chichiteux gnangnan
_ une belle carte des vins à prix raisonnables
Les - :
_ menu dégustation signifie portions congrues et c'est si bon qu'on en veut plus !
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