Il y a 3 ans, tout le monde succombait à Dilia. Ce restaurant croulait sous les bonnes critiques. A l'époque, je n'avais pas été emballé. Mais voilà, un lecteur de ce blog m'a vivement encouragé à y retourner. C'est chose faite. Merci à lui !
Dilia avait "la carte". Les gorges chaudes - avec barbe, tatouages, Stan Smith aux pieds et fins de phrases en "quoi" - y allaient de leurs flagorneries sans barguigner. La phase exploratoire et branchouille de l'endroit semble avoir pris fin. Place à la cuisine?
C'est sur cette petite placette charmante à l'ombre de l'Eglise Sainte-croix de Ménilmontant, au coeur du 20ème arrondissement que se situe ce restaurant aux influences italiennes. Des tables en terrasse, et une allure d'auberge. C'est très accueillant, surtout par ce beau temps !
J'entre, et on me demande "et où est-ce qu'on va s'asseoir?". Oui, vous avez bien lu, on m'a parlé à la 3ème personne comme ça ne se fait plus. Il faut dire que c'est très désagréable. Par ce temps, ce sera à l'intérieur de cette salle très plaisante : des briquettes, pas mal de lumière, un joli plancher.
Pour le week-end au déjeuner, c'est le menu du soir qui s'applique sans choix si ce n'est le nombre de services au programme : 4, 6 ou 7, à 59, 66 ou 79€. Sinon, le jeudi et le vendredi, un menu déjeuner existe à 21€ qui peut s'avérer un bon plan ! Des consonances italiennes à tous les étages, c'est une carte très personnelle que propose le chef Michele Farnesi.
Ça démarre assez rapidement avec un amuse-bouche : deux panais au romarin dont l'un est partiellement recouvert de lard colonatta. C'est un excellent début, gourmand, bien goûteux, j'en aurais bien mangé plus !
Puis, un deuxième grignotage d'avant-repas arrive. Chouette ! Une tranche de cochonaille fumée avec du poivron. Pas mal du tout !
C'est au tour d'une troisième bouchée! Un beignet à l'aubergine et ricotta. Là, c'est bon, mais j'avoue que le goût de bugne bien huileuse ne m'emballe pas plus que ça.
Petite pause avant de voir débouler mon entrée : Tortellini de courgettes et persil, guazetto de moules, poutargue. C'est élégant et ça sent bon. Evidemment, le goût de la courgette est absent (si tant est que ce légume aurait un goût!). Mais cette petite sauce marinière légèrement amère, le pourpier et la poutargue apportent une belle complexité à l'ensemble, c'est très plaisant.
A la table à côté de moi, deux personnes qui causes ENA et grandes écoles, mais je suis étonné quand l'un des serveurs qu'ils ne connaissent ni d'Eve, ni d'Adam, s'assoit à leur table pour causer de leur choix de vin. Voilà qui n'est pas très agréable monsieur qui êtes déjà à deux doigts de donner du "tu" à loisir!
Pour le poisson, l'assiette joue la limpidité : Thon mi-cuit, jus de poivron, ricotta fumée, cassis. Trois petites bouchées de poisson dans un jus poivron avec des touches acidulées avec ces grains de cassis crus. C'est osé d'intégrer ce fruit rouge ici, mais ça fonctionne. On sent bien en bouche chaque élément - aneth incluse - et ça marche ! J'aime le relief exprimé sans pour autant masquer le goût du thon.
Le chef à n'en pas douter, a un certain sens pictural dans son approche de la cuisine quand je vois mon plat, le Pigeon, pesto de cacahuètes, maïs et mûres. Tel un meurtre qui vient d'être commis, un voile pudique (une feuille de blette) recouvre le pigeon dont seule une griffe ressort et un jus brillant. Dessus, des mûres qui ont été passées à la poêle. Dessous, du maïs et un condiment réalisé avec des cacahuètes concassées. Ça en fait des éléments et des saveurs ! Très belle cuisson de la volaille. J'adore le pigeon, et là je ne suis pas déçu! Jus parfait et pesto très intéressant. J'ai plus de doute sur le maïs qui n'apporte pas grand chose à part faire du volume... Très beau plat original.
J'aime les surprises dans un repas, surtout quand elles prennent la forme d'une pana cotta à la lavande et pêche présentée en guise de pré-dessert. Voilà qui devrait rassurer tous ceux qui auraient peur d'avoir faim en venant ici! Ce petit pot, très parfumé est délicieux.
Et je ne suis pas arrivé au bout de mes surprises avec le dessert : Dacquoise, framboises, crème citron amandes et câpres. Cherchez l'intrus ! Oui, des câpres dans un dessert, il fallait oser ! Pourtant, même si c'est étonnant et particulier, ça le fait comme dirait les jeunes. Elles apportent un peu de sel et de pep's (heureusement, car la crème citron est faiblarde) et casse la dacquoise trop sucrée. C'est bon tout ça.
Dilia propose une carte des vins à rallonge. Il y a des pages et des pages de crus français et italiens au choix ! Au verre, on se laisse guider, et ainsi, j'ai eu le droit à un excellent verre de Toscana blanc, vermentino San Ferdinando 2017 à 8€.
Après un bon café (sans mignardise, moi qui avais été habitué à toutes ces petites attentions hors menu, suis un peu déçu!) à 3€, l'addition : 60€. C'est un prix gastronomique mais pas astronomique. L'endroit est agréable, le service quand même un peu trop décontracté du genre "j'me la raconte", et la cuisine surprenante du chef doit en dérouter plus d'un, Dilia ne laisse pas indifférent. Ça change de ma première visite il y a 3 ans où j'étais ressorti avec une vraie impression de banalité.
En sortant je vois sur la terrasse un barbu tatoué un peu partout. Mais oui, je le reconnais ! C'est Jeff Schilde, le chef du Petit Panisse. C'est vrai qu'il y a une vraie parenté dans l'audace des plats !
Dilia
1 Rue d'Eupatoria
75020 Paris (Métro Ménilmontant)
Tel : 09 53 56 24 14
Fermé le lundi midi, le mardi et le mercredi
Les +:
_ belle cuisine audacieuse (qui peut déplaire je pense)
_ des dressages très esthétiques (qui ne peuvent que plaire eux)
_ super pain
_ bon rapport qualité-prix
_ les amuse-bouche et le pré-dessert en sus
_ endroit agréable
Les -:
_ service limite cavalier
_ et mes mignardises alors?