Il existe encore à Paris, de vieilles maisons qui cultivent avec abnégation la belle cuisine française sans tomber ni dans la pompe, ni dans la fainéantise. Le Restaurant l'Assiette célèbre à sa façon l'art de vivre à la française notamment avec un cassoulet qui vaut son pesant de... haricots !
Voilà bien longtemps que je vois passer des avis enamourés de l'Assiette. Une cuisine franche voire franchouillarde et donc totalement régalante. L'occasion m'est donc donnée d'y poser mes couverts l'espace d'un déjeuner un samedi ensoleillé d'avril.
Dans cette longue rue du Château, pas grand monde. Il y a bien deux restaurants qui se sont fait remarquer récemment - Le Layon et Giulia - mais l'artère semble calme le week-end. Avec sa devanture rouge écarlate et son enseigne "charcuterie" d'époque, cette Assiette sent bon la tradition parisienne.
Une fois franchie la porte, l'atmosphère du lieu vous emporte. Panneaux de verre peint au plafond, vieux guichets en marbre, machine à découper le jambon à l'ancienne et un beau saint-nectaire font office d'accueil.
Je remarque tout de suite que je ne serai pas le seul homme à déjeuner seul ce midi. Déjà pas moins de 3 tables sont occupées en solitaire ! Ailleurs, ça parle plutôt étranger : japonais par là, chinois par ici, américain encore un peu plus loin. C'est que la réputation de ce restaurant a déjà fait le tour du monde.
Et tout ce beau monde est venu aguiché par une seule perspective : se régaler d'un des très bons plats traditionnels de la carte à commencer par le cassoulet à 31€ (tout de même...). Une formule déjeuner est aussi proposée, même ce samedi, à 24 euros pour 2 services.
La carte pour sa part a des entrées qui varient de 11€ (pour le velouté du moment) à 27 euros (tartare de veau et crevettes bleues) et des plats qui oscillent entre 26 euros (pour la cocotte de légumes) à 39€ pour le ris de veau. A noter le louable effort de proposer une option végétarienne dans un tel établissement. Toujours est-il que les prix ne sont pas donnés, il va falloir que le chef David Rathgeber soit à la hauteur !
Pour faire mieux passer les tarifs et donner un avant-goût de bienvenue, du jambon blanc est proposé dans une petite assiette, à déguster avec un pain du tonnerre. Voilà qui met en appétit !
Je commence par un saut dans l'inconnu avec des clapotons d'agneau en entrée. kesaco ? Ce sont des pieds d'agneau qui ont été désossés et mélangés avec des jaunes d'oeuf, de la crème et une vinaigrette acidulée. Le tout repose sur de larges tartines de pain grillé.
J'essaye d'y aller au couteau. Mais cette spécialité lyonnaise me résiste. Ce sera donc à la main que je dévorerai ces tartines gourmandes et vraiment succulentes !
Dessous, la frisée a aussi du répondant, et pour lui apporter encore plus de goût, de petits morceaux de hareng fumé y ont été glissés. Belle découverte.
La table à côté de moi s'est remplie. Une maman avec sa jeune fille. Cette dernière tousse grassement comme une fumeuse de bon matin, à s'en décrocher les poumons ! Bon appétit !
Après une petite attente, un dessous de plat en fonte est posé sur ma table. Une assiette vide suit. Et le voilà, l'attendu, le désiré, le cassoulet ! En guise de haricots, ce sont ici des mogettes de Vendée. Et côté viande, c'est la profusion avec pas moins de 6 différentes : confit de canard, poitrine et travers de porc, lard fumé, saucisson, saucisse au couteau et agneau ! Ça frémit, dans le pot en terre cuite. Voilà qui est généreux.
Alors j'attaque le monstre en cassant la croûte formée par son passage au four chaud. C'est aussi impressionnant que ça en a l'air. Il y en a au moins pour 2 personnes. On ne lésine pas sur le haricot ici. C'est généreux, onctueux, et tout simplement régalant. Il y en a tellement, que ça rend superfétatoire l'entrée et le dessert ici, même si on est armé d'un solide estomac ! C'est effectivement un excellent cassoulet dans les règles de l'art!
J'avoue, avoir laissé une partie des légumes secs... Pour trouver encore un peu de place pour un dessert !
Je tente le baba au rhum (à 14€ tout de même). Il arrive, majestueusement couché dans l'assiette, délicieusement flanqué d'une quenelle géante de crème fouettée à la vanille. La bouteille de rhum brun 3 Rivières est laissée à discrétion sur la table, histoire d'ajuster à son goût le degré d'alcool de ce dessert. Une nouvelle fois c'est généreux et très bien exécuté. Le baba, léger comme un nuage s'avale tout seul (même si je commence sérieusement à avoir les dents du fond qui baignent) !
Même le café répond à cette logique d'opulence et de partage. Il est accompagné d'une vieille boîte en fer remplie de biscuits boudoirs maison, très bons !
Le vin n'est pas en reste. Il y a même un sommelier dans la maison qui sait conseiller à merveille les vins de sa cave, même sir les prix au verre ne sont pas donnés (10€ minimum). J'ai donc pris sur ses conseils un rouge des Côtes de Provence du Clos de l'Ours, cuvée le Chemin 2016 à 11€ (Coef 3). Une très belle référence qui a bien accompagné le cassoulet.
La note finale pique un peu forcément : 74€. Et même avec la formule, difficile de s'en tirer à moins de 50€ ici. Le bon plan consiste à se focaliser sur le cassoulet à 30€ seul, suffisamment roboratif pour ne pas crier famine jusqu'au lendemain ! Mais c'est une expérience très agréable qui se tente quand on a besoin de renouer avec la tradition du bien manger à table. Côté tradition, oubliez Mamie par Jean Imbert, foncez plutôt ici!
L'Assiette
181 Rue du Château
75014 Paris (Métro Pernety)
Tel : 01 43 22 64 86
Fermé lundi et mardi
Les +:
_ ambiance bonne franquette
_ des plats qui respirent la générosité
_ un cassoulet aux 6 viandes de compétition
_ le pain est un délice (avec ce jambon, miam!)
Les -:
_ c'est cher, mais ça vaut ce prix-là.