En tant que grand fan du meilleur réalisateur de cinéma de tous les temps et de tout l'univers, à savoir Akira Kurozawa, je ne pouvais que me rendre dans un restaurant dont le nom rend hommage à l'un de ses films mythiques...
Il faut le savoir, quand j'ai vu Ran à la TV, je n'étais pas bien vieux, et ça a été mon premier choc cinématographique nippon, le point d'entrée qui m'a poussé à creuser ce sillon fabuleux à profiter des joies du 7ème Art. Alors quand Ran arrive, moi, j'accours !
Direction les beaux quartiers, la rue d'Anjou. L'occasion de voir tristement que le magnifique Bien Aimé (et son décor incroyable) a mis la clé sous la porte... Le Roi est mort, vive le roi me dis-je, et peut-être s'est-il réincarné en version nippone? Hôtel particulier d'époque, service de voiturier, grande entrée monumentale, ça en jette pour qui aime le clinquant ! Mais je vous l'avoue je recherche plutôt le gourmand, alors... Il y a quelques mois encore se tenait ici le restaurant le 1728 qui lui aussi est passé de vie à trépas.
A l'intérieur, c'est grandiose ! après un large vestibule avec un beau bar, trois salles à la hauteur de plafond imposante s'enchaînent. On peut bien caser une centaine de convives ici ! Mais pour l'instant, seule celle du milieu se remplit. Les serveurs sont faciles à repérer, tel un uniforme - un peu ridicule - ils portent tous un chino rouge vif et une chemise blanche. Clin d'oeil au drapeau nippon?
Cette ambiance clinquante mais pas guindée, n'est pas sans me rappeler Girafe.
La carte se déplie et propose de nombreux choix : des entrées froides ou chaudes, des sushis, des plats, des grillades... CINQUANTE entrées, plats et desserts en tout et 9 accompagnements ! N'en jetez plus ! Les prix sont aussi au niveau du cadre. Une formule déjeuner bouillon - entrée - plat (et riz blanc) est proposée à... 36€. Au programme de la cuisine japonaise légèrement "twistée" comme j'imagine aiment à dire les fondateurs du lieu.
Pas le temps de traînasser, à peine la commande passée qu'arrive mon entrée : Riz croustillant et tartare de thon spicy. Présenté dans un panier vapeur (?), 7 petits dés de riz qui ont été passés à la friteuse, leur conférant une certaine élasticité, mais pas forcément un goût prononcé. Pour ça, il y a ces "rillettes", car oui, soyons honnête, quand on parle d'un tartare de thon dans un restaurant japonais de ce standing, on ne s'attend pas vraiment à voir ça, un bloc orangeâtre avec deux morceaux d'avocat dessus... Je dois l'avouer, le mélange avec le riz croustillant est agréable et légèrement pimenté, même si je regrette un bon pain qui aurait été bien meilleur avec. Evidemment, il n'y a pas assez de cubes pour terminer les rillettes, et me voilà les finissant à la cuillère... classe !
C'est une belle pièce qui arrive ensuite : Travers de porc fondant, sauce au poivre noir et cébette. Pour accompagner ça, il faut bien entendu rajouter un accompagnement : 4€ pour un mini-bol de riz blanc. La taille du travers est impressionnante et fait plaisir à voir. Par contre, la viande ne s'avère pas vraiment fondante et il faut user activement du couteau pour s'en sortir à décortiquer les os. Au goût, la sauce au poivre caramélisé laisse poindre des touches de gingembre, c'est plutôt bon, même si on ne sent pas beaucoup le goût du porc qui n'a pas l'air de briller par sa qualité... Le riz pour sa part est correctement cuit.
Pour le dessert, rien de bien enthousiasmant sur la carte sinon les pâtisseries proposées à ... 14 euros l'unité ! Ça doit être quelque chose ! J'ai hésité avec l'éclair Paris Brest mais j'ai finalement pris la tartelette citron-yuzu. Premier étonnement quand elle arrive, elle est minuscule. Elle doit faire 7 ou 8 centimètres de diamètre. Dessus 3 cailloux de meringue, autant d'écorces de citron confit et 2 mini-suprêmes. Une pointe de feuille d'or si petite qu'elle en devient mesquine surplombe le tout. A la cuillère, pas évident à couper la pâte sablée. Je vois vite que la crème citron se tient à peine. En bouche, les écorces écrasent tout. Pas la place pour de la nuance. C'est bof.
J'ai accompagné ce repas avec un verre de Chablis 2017 de la maison Cyril Gautheron à 10€ quand même. Un vin honnête, mais que l'on trouve à moins de 13€ la bouteille sur Internet... joli coef !
Quand la note finale arrive, ça pique un peu - 67€ - mais pas suffisamment pour se faire seppuku ! On a l'impression une nouvelle fois que tout a été pensé pour impressionner (et le décor y parvient) en oubliant ce qu'il y a dans l'assiette. Pas que ce soit mauvais, mais juste très cher pour ce que c'est. Et, a contrario d'un Girafe, le lieu ne justifie pas un tel tarif. Dans un style très voisin, mieux vaut fréquenter les belles adresses chères à Philippe Starck : BON et Miss KO.
Ran
8 Rue d'Anjou
75008 Paris (Métro Madeleine)
Tel : 01 40 17 04 77
Ouvert tous les jours
Les +:
_ le décorum
_ l'armée en chino rouge très prévenante
Les -:
_ trop cher pour ce que c'est
_ j'ai eu des difficultés techniques à manger mes 3 plats...
_ la mini-tartelette à 14€...
_ Où est Kurozawa dans cette histoire au final?