Encore un groupe (ici japonais) qui s'étend : après Ao Izakaya (bof, bof), To (re-bof, bof), Shiro (ahah! mauvais souvenir), Passionné (pas envie de tester....), voici le fleuron annoncé : Sphère. Là, ils ont tout donné et visent une récompense Michelin visiblement.
Par Arnaud Morisse
Dans la très chic rue de la Boétie, un Exki a laissé sa place à un non moins chic nouveau restaurant : Sphère. C'est clinquant ! Les Kardashian pourraient bien aimer l'endroit.
La salle étonne par sa taille : avec ce standing, il est rare de voir (hors hôtels) des restaurants dépasser les 60 couverts. C'est le cas ici, avec plusieurs zones et plusieurs ambiances. Mais ça reste très épuré, voire dépouillé. Une sculpture ici ou là, 1 ou 2 tableaux pourraient avantageusement décorer l'endroit, mais la déco, ce n'est pas ma spécialité. Musique classique au piano genre grand restaurant à l'américaine.
Evidemment les prix pour ce dimanche midi, sont ceux du soir : de 75€ pour 4 services à 128€ pour le 8 services. Il est bon de savoir que la semaine, Sphère propose des menus moins ambitieux au déjeuner à 38€.
On commence rapidement avec les amuse-bouche : au nombre de 4, on m'indique bien gentiment l'ordre de dégustation (haut, gauche, droit, bas). Quand je commence avec la mini-gougère, je m'interroge. Insipide. Rien, aucun goût notable. Ah.... J'enchaîne avec la mini-madeleine au chorizo ibérique. Voilà du goût ! Mieux, ça explose avec le morceau de maquereau ! Miam ! Plus de subtilité pour la dernière bouchée.
Au tour de la Daurade marinée aux agrumes, la première entrée. C'est équilibré, plein de peps avec les suprêmes de pamplemousse et le condiment acidulé qui va bien. Les papilles sont en éveil.
Divine surprise our l'accord mets vin, en fait il y aura des sakés pour ma sélection (5 verres pour 70€). Mieux, les godets s'avèrent plutôt bien rempli, là c'est mon foie d'ivrogne qui cause. Je commence donc l'accord avec un saké bijofu, minéral et précis. J'aurais peut-être vu un autre mariage avec cette entrée, avec un vin, un gin, un saké aux notes plus citronnées.
Pendant ce temp un coupe de soixantenaire, visiblement habitué aux grands restaurants et ne brillant pas par sa discrétion clame au chef "je suis prêt à parier une bouteille de champagne que vous aurez une étoile en janvier".
Deuxième entrée : tagliatelles de calamar. On est loin du plat phare de Jean-françois Piège. Ici, c'est travaillé avec du radis noir, de la courgette, du quinoa, une sauce anchois et un condiment citron qui vivifie le tout. C'est pas mal du tout.
Bon, mon menu comprenait 2 entrées, et c'est justement la 3ème de la carte qui me faisait de l'oeil. Bon, je la commande en supplément.
Pour l'accord, c'est du vin blanc : un bourgogne blanc en Clos de la chaise un monopole de la maison Philippe le Hardi. Petit problème, le vin n'exprime rien du tout, au nez ou au palais, zéro... Encore ce vieux doute de COVID (c'est la mode), alors je reviens sur le reste de saké, et ouf, j'ai bien tous mes sens. C'est le vin qui est passé, ouvert depuis trop longtemps. Problème signalé (je n'ai même pas fini mon verre, c'est dire !), on m'en offre un autre sur ma troisième et très attendue entrée...
Avouez que si vous aviez lu aussi "poelée de cèpes, espuma de cèpe, oeuf parfait et pommes allumettes", vous auriez voulu l'avoir dans votre menu, non? Bon, ça me rajoute un petit supplément de... 29€. Les odeurs qui se dégagent du plats ravissent mes narines. C'est vraiment très bon. Aucun risque certes : des champignons et des patates, ça a toujours fait bon ménage. Mais vraiment, je prends mon pied.
D'autant que le godet de remplacement est un joli givry des vignerons du Buxy.
Pour le plat de poisson, c'est Queue de lotte rôtie, poireaux crayon, espuma beurre noisette. Pour avoir le homard, il faut prendre le menu prestige à 128€. Mais je suis content avec ce plat. Magnifique cuisson du poisson, qui s'accorde bien avec tout le reste, y-compris ces petites pousses de petits pois pour la petite note végétale et sucrée qui va bien.
Retour au saké avec un kuheiji, bien plus expressif et floral que le premier, il est assez délicieux, et va très bien avec ce poisson.
Les plats s'enchaîne à bon rythme (il faut dire qu'il ne doit y avoir que 3 autres tables occupées, Sphère a ouvert il y a 2 jours seulement). Filet de boeuf, jus corsé, carotte violette et purée de pomme de terre. Rien de sorcier dans l'intitulé, steak purée en somme, mais là encore, je me régale. Cuisson idéale de la belle viande simmental,
En accord (et après m'avoir proposé un choix), je tente un saké, un junmai Akitora avec un polissage à 80%. Vraiment délicieux et qui passe bien avec la viande.
J'ai encore faim naturellement pour accueillir dans me gros ventre le pré-dessert : Fruits exotiques. Une déclinaison fraîche et équilibrée de fruits d'ailleurs. Un bon dessert très classique dans ses saveurs.
En accord, un saké aux notes de chocolat blanc très marquées. Etonnant.
Un accord qui fait mouche avec le dessert Tout Chocolat ! Pareil, pas d'excentricité, du déjà vu et goûté, mais du bon.
Petite note amère sur la fin : un café Illy (3,50€) indigne du lieu m'est servi sans mignardise... Etonnant.
Quand l'addition arrive, heureuse surprise : 130,50€ ! seulement ! Je signale tout de même que je trouve étonnant de m'offrir l'accord mets-vin? "Ho oui, excusez-moi, il y a erreur, voici la bonne addition" 200,50€... C'est très cher, mais vu la qualité des mets servis, pourquoi pas? Par contre, pour décrocher une étoile, il va sérieusement devoir travailler pour avoir un soupçon de créativité, d'originalité et de personnalité dans les assiettes. Car là, c'est que du déjà vu à 100%, très bien fait, mais sans aucune identité avec des associations de saveurs évidentes et faciles. Heureusement la découverte de sakés en accord apporte un brin d'originalité.
Sphère
18, rue de la Boétie
75008 Paris (métro Miromesnil / Saint-Augustin)
tel : 01 44 90 02 95
Fermé le lundi
Les +:
_ une superbe sélection de sakés avec des accords osés
_ un service pro
_ des plats très bien réalisés
_ c'est bon...
Les -:
_ ... mais déjà vu. Aucune originalité. Associations de saveurs faciles.
_ salle froide et ambiance un peu ampoulée
Repas du 25/09/22