Pas de cheveux sales et d'accent gouailleur dans ce Marloe-là, mais un bistrot chic du 8ème arrondissement qui n'a pas oublié d'être malicieux.
Les annexes des restaurants étoilés sont souvent de très bons plans. Des fournisseurs de qualité pour une cuisine qui n'a pas le droit de se louper, car le chaland sait où il met les pieds. Marloe est le petit frère bistrottier de l'Arôme, 1 étoile Michelin.
De l'extérieur refait à neuf, ce bistrot a des airs de grandes brasseries. Des tables en terrasses, de la pierre blanche et une dominante de bleu foncé, c'est assurément élégant, très 8ème arrondissement.
Cette couleur bleu, ce bois précieux, ce plancher au sol me font penser un peu à un navire. Des globes dorés en luminaires, une belle trancheuse trônant au milieu de la salle, et des armoires à vins nous ramènent bien sur terre.
Du côté de la cuisine, pas de menu ni formule, mais une collections de plats plutôt variés avec une tendance prononcée pour les canailleries à base de viande et de cochon. Entrée et tapas à partager de 13 à 29€ et des plats qui varient de 19 à 39€.
Comme un passage obligé ici : les cromesquis de pieds de cochon relevés à la moutarde douce Savora (13€). Dans une assiettes sombres, 6 boulettes dignes représentantes de cette cuisine canaille propre au lieu. D'ailleurs, au moment de les avoir, le serveur me fait un clin d'oeil entendu du genre "t'es v'nu pour t'faire plaisir mon gars, on s'comprend!". Les doigts se révèlent le parfait instrument pour ce grand moment de régalade éhontée. Ces petites boules renferment sous leur panure une farce fibreuse et juteuse de cochon avec un bon goût! La moutarde en plus ajoute du mordant à l'affaire agréablement. Je comprends la vogue pour ce plat !
Les vacances qui approchent, les soubresauts des élections européennes, ou un appel de la nature, allez savoir pourquoi, en tout cas j'enchaîne avec le seul plat végétarien de la carte : le risotto petits et morilles lié au parmesan (28€).
Avec ses 3 triangles de fromage fichés sur le dessus, ses pétales de fleur et ses nombreuses herbes, ce plat met en appétit. Mais très vite je vois que le riz baigne dans de la sauce. En fait, ce risotto manque cruellement de liant et de gourmandise. Déjà qu'il est végétarien, en plus il ressemble à un plat régime ! Double peine ! Les morilles - comme la plupart mangée cette année d'ailleurs - manquent de saveur. Le riz et les petits sont justement cuits et au final le tout passe bien.
Je fais part au service de ma déception de ne pas avoir eu un risotto mieux lié et avec du jus. Après en avoir avisé le chef, on vient me dire que c'est une volonté de l'étoilé Thomas Boullault de la maison mère, l'Arôme, d'avoir cette consistance. Drôle de choix après avoir eu ce pic de gourmandise en entrée...
C'est alors que je fais preuve d'un sang froid hors pairs, d'une maîtrise de ma personne sans faille, car on me présente un magnifique plateau de fromages de la maison Dubois... Ils ont l'air affiné à la perfection et ne demandent qu'à être dévorés sur place.... mais non, je résiste, c'est mieux pour moi de terminer sur une note sucrée aujourd'hui !
En dessert, un gâteau très traditionnel qui ne se retrouve que rarement sur la carte des restaurants : le fraisier (14€). Ici, annoncé léger avec des fraises gariguettes et de la crème mascarpone vanille, a eu un lifting ! Dans une coupe conique qui repose sur un présentoir avec de faux pétales de rose rouges et blancs du plus kitsch, une surface simplement maculée du signe "égal" en rouge avec un pourtour de la même couleur. Une petite fraise qui a été trempée dans un sirop épais complète "l'oeuvre". En voilà une présentation peu commune !
C'est en fait la génoise qui fait office de couvercle. En dessous, la crème bien vanillée et des fraises en petits morceaux et en (trop) petite quantité. Me voilà replongé dans les goûts de mon enfance - j'avoue je n'aimais pas trop ça alors - avec une facture des plus classiques ! Pas de tralala pour moderniser la sauce, pas de "twist" pour corser le ton, rien que du classique plutôt plaisant.
L'établissement peut s'enorgueillir d'une très jolie carte des vins avec un joli choix au verre (4 rouges, 4 blancs, 3 champagnes et 1 rosé). Je prends le godet le moins coûteux : un saint chinian La Madura 2016 à 8€. Très bon vin avec une belle longueur en bouche et des saveurs de fruits rouges mûrs intenses.
Je découvre sur l'addition que le café a été offert, voilà un geste toujours sympathique, mais ce déjeuner monte haut quand même : 63 euros ! C'est cher, d'autant que je n'ai pas forcément pioché dans le répertoire le plus onéreux du menu... Le risotto liquide m'a franchement déçu alors qu'avec les cromesquis j'étais parti dans un autre monde de gourmandise. C'est dommage ! Mais je pense qu'il y a de quoi se régaler au Marloe à condition de ne pas regarder le prix, de céder à la tentation du fromage, et d'opter pour un régime 100% carné !
Marloe
12, rue du Commandant Rivière
75008 Paris (Métro Saint-Philippe du Roule)
Tel : 01 53 76 44 44
Fermé le samedi et le dimanche
Les +:
_ une déco cossue et des banquettes confortables
_ accueil aux petits oignons
_ des plats gourmands... en général !
_ le pain (Poujauran évidemment!)
Les -:
_ le risotto liquide
_ des tarifs élevés et sans formule ni menu