Le Reflet (Paris 3) : concept pas idiot

Fort d'un premier succès à Nantes, Le Reflet s'installe à Paris avec une louable intention : insérer des personnes trisomiques dans le milieu professionnel. Mais les beaux sentiments font-ils toujours de bons restaurants?

Comment ne pas passer pour un ignoble cuistre, un sinistre individu et un monstre sans coeur quand il s'agit d'émettre une critique sur un restaurant dont l'objet met même respire le bien et l'humanité ? Piège ultime pour les critiques ! Pourtant, même si c'est clamé haut et fort "restaurant extraordinaire", Le Reflet demeure un établissement ordinaire où l'on vient s'attabler pour bien manger et boire. Mais ici, on travaille avec une majorité de personnes trisomiques dans le but de les insérer dans un véritable projet professionnel d'une part, mais aussi de faire changer le regard sur ce handicap. Il est vrai que si l'on est pas directement touché par la trisomie 21, on est rarement en contact avec ces personnes...

Noble démarche donc pour cette adresse nichée en plein coeur du Marais, rue de Braque. Façade élégante. Ludo, un ami qui habite juste à côté et que j'ai convié ce midi, m'indique qu'ici se trouvait il y a des années et des années un club échangistes, autre forme de sociabilité visant à réchauffer les coeurs.

Je rentre vite et ne prends pas garde à lire les tarifs à l'entrée... C'était ma seule chance de les voir, je ne vais donc pas savoir combien va me coûter ce repas avant l'heure de l'addition.

Accueilli très aimablement, je suis confié à une jeune femme charmante trisomique qui m'installe très gentiment. Cette salle aux murs grattés et bruts s'avère agréable et lumineuse et dans la droite lignée des établissements du coin.

Sur la table, pas de carte traditionnelle, mais des formulaires à tamponner et un menu sous forme de petits papiers. Avant de bien tout comprendre seul, je me sens un peu bête... Un papier pour les vins (très belle sélection de flacons, d'ailleurs je me jette sur le Morgon Côte du Py 2017 de Jean Foillard à 55€!) et un autre pour les victuailles. De la cuisine ménagère au programme, avec un amuse-bouche mystère suivi d'un plat et d'un dessert.

Mais très vite le mystère s'évanouit, car notre amorce de repas arrive ! Il s'agit en fait d'une tartine oignons doux et magret de canard. Ludo, "fromageophobe" primaire s'inquiète. Est-il caché sournoisement un bout de gruyère quelque part. Non, Ludo, c'est bon, tu peux y aller ! Lui à la main, moi avec mes couverts, bien proprement. C'est sympathique. La qualité du canard ne saute pas aux yeux ni aux papilles, mais ça reste correct.

Pour suivre, la traditionnelle saucisse purée. Dans l'assiette une petite saucisse, un peu de purée et du jus parfumé. C'est pas mal, même si pour ce genre de plat c'est servi un peu chichement à mon goût. Un plat pas incroyable avec une qualité correcte de saucisse, et qui se remarque d'autant que l'on boit un super vin à côté de ça.

Puis vient le dessert que je n'ai même pas pris soin de prendre en photo. La tarte normande semble tout droit sortir de son emballage. Elle ne fait pas rêver, et ce n'est pas le mini-pointe de crème avec une fleur qui change l'affaire. Décevante.

C'est alors que l'on se dirige pour payer l'addition (après un café allongé pour Ludo). A combien allons-nous en en sortir? Réponse : 97,50€ pour deux dont 55€ de vin et 2,50 de café. Calculs faits, le menu déjeuner s'élève à... 20€. Un peu cher vis-à-vis de ce qu'il y a dans l'assiette. Le soir c'est 30€ pour entrée-plat-dessert. Du Reflet, il ne faut donc retenir que deux choses : le service adorable avec cette intention louable d'insertion, et la carte des vins pas trop chère et régalante. Dommage que la cuisine ne suive pas cette même voie... Et là, je passe pour un monstre ignoble.

Le Reflet
11 Rue de Braque
75003 Paris (métro Rambuteau)

Tel : 01 42 71 35 97

Fermé le samedi midi, le dimanche, le lundi et le mardi soir

Les +:
_ le projet formidable d'insertion
_ lieu calme
_ service agréable et compétent
_ belle carte des vins

Les -:
_ cuisine ménagère pas incroyable