Joseph & Raymond (Paris 10) : jeune adresse pour plats d'antan

Quand on ne verse pas dans un flexitarisme quasi-militant, ou dans une "asianité" incertaine, on se réfugie dans les recettes de grand-mère en ce moment à Paris. Le restaurant Joseph et Raymond tente l'aventure de la madeleine de Proust avec de grands classiques gourmands.

Quand on parle de quartiers parisiens où la concurrence ne fait pas... de quartier, il y a ce coin du 10ème arrondissement du côté du métro Château d'eau. Les nouveaux restaurants y poussent comme des champignons (Bruce, le Grand Café d'Athènes et l'Avant-poste ont ouvert ces derniers mois) comme ils ferment sans coup férir (regretté The Dude...). Faire son nid s'avère un challenge de haut niveau.

Prenant la place du Comptoir iodé qui aura fait long feu, Joseph et Raymond et leur concept de cuisine de grand-père espèrent faire la différence. Nouvelle couleur de devanture, mais reste cette immense enseigne en bois brut au dessus... sans marquage encore. Un lieu aux allures anonymes qui vient juste d'ouvrir.

A l'intérieur, le bar, la cuisine semi-ouverte et le mobilier sont hérités tout droit du restaurant précédent. Mais il y a eu un travail pour éclaircir la salle et abandonner le bleu nuit sur les murs. C'est plutôt agréable. 

De la musique de fond évidemment, et c'est bien dommage. Heureusement elle n'est pas trop forte.

Sur la jolie carte, des plats qui ne peuvent que donner l'eau à la bouche : oeuf en meurette (7€), calamar grillé au chorizo (7€) daube de boeuf (16€), poulpe grillé (24€), épaule d'agneau (58€ pour 2), poitrine de cochon (15€)... Il y a même un bouillon végétarien avec pâtes alphabet pour retomber en enfance illico.

En hommage au championnat du monde de l'oeuf en meurette qui se déroule aujourd'hui même au château du Clos de Vougeot au coeur de la Bourgogne, je ne peux pas passer à côté de cet incontournable de la cuisine française !

Il arrive dans sa petite cocotte brûlante qui repose sur une très jolie assiette décorée à l'ancienne. Les couverts vintage en métal argenté ont aussi une jolie tête. Une fois ouvert, on n'aperçoit que la sauce au vin rouge (en théorie du bourgogne donc...).

Je plonge ma cuillère, trouve l'oeuf, en découpe un morceau, voit le jaune légèrement liquide, et puis je gobe (après avoir soufflé bien sagement). C'est bon, mais il manque ce goût fumé des lardons qui d'habitude garnissent cette sauce. Là, il n'y en a pas. Seuls des morceaux de carotte s'y trouvent. Avec le bon pain baguette, c'est agréable, mais je reste déçu. Où est mon cochon?

En attendant la suite, j'apprends en écoutant la prise de commande de la table d'à côté, qu'il y a une formule déjeuner? Ils n'ont pas l'air très loquaces à ce sujet puisque rien ne l'indique sur la carte et aucune précision ne m'a été donnée à l'oral... Tant pis.

Et c'est le même scénario qui se trame pour la suite avec le plat vendu comme "la spécialité de la maison", le mijoté de boeuf à la provençale aka daube de boeuf. C'est magnifique. Tout en générosité, dans une belle assiette, les coquillettes ont été mélangées avec une jolie sauce, des carottes et des morceaux de viande. Dessus, un brin de thym qui a été flambé histoire d'apporter une bonne odeur. Oulala ! C'est redoutable !

Mais au goût, c'est plutôt raplaplaplat. Pas mauvais, mais ça manque grandement de goût. Il faudrait peut-être plus d'herbe, des olives, des zestes d'orange....? En tout cas, je ne tire vraiment plaisir que de la quantité servie. Idéal pour calmer ma faim.

Les 3 desserts à la carte creusent encore plus loin le sillon de la nostalgie régressive : mousse au chocolat (6€), figues rôties (8€) et riz au lait (6€). C'est vers ce dernier que ma gourmandise me conduit. Dans un joli bol, encore une bonne portion avec au-dessus de beaux suprêmes d'agrume. Sa consistance est plutôt molle mais pas liquide, mais ça s'avère un bon compromis pour ne pas être trop étouffant. A vrai dire, je me régale avec ! Bien parfumé aux zestes d'agrume, c'est un vrai plaisir à dévorer !

Pour le vin, une gentillette collection au verre de 4 à 9€. Avant tout des valeur sûres comme ce morgon de Dominique Piron, Grand cras 2018, que je choisis (7€). Un vin bien fait qui nécessite un peu d'ouverture et qui s'est bien acclimaté aux saveurs bourguignonnes et provençales.

Mais voilà l'heure de l'addition : 39€. Même sans cette mystérieuse formule, ça reste raisonnable d'autant que je n'ai plus faim du tout en sortant de table ! En expliquant ma déception de ne pas avoir trouvé de lard fumé dans la sauce meurette, on m'a répondu qu'ils réfléchissaient effectivement d'en rajouter. Ça serait super ! Il faut encore bien caler les recettes proposées pour qu'elles soient bien toutes goûteuses, car la générosité est bien là. Joseph et Raymond (concrètement Aurel et Yann) proposent une offre sincère et bon marché qui pourrait rameuter les personnes en mal d'enfance.

Joseph et Raymond
8 Rue de Paradis
75010 Paris (métro Château d'eau)

Tel : 09 53 32 55 45

Fermé le samedi midi et le dimanche

Les +:
_ des plats (en sauce!) d'antan tout en générosité
_ des prix pas très élevés
_ cadre sympathique
_ superbe riz au lait

Les -:
_ des oeufs en meurette sans lardon (ça devrait changer, croisons les doigts !)
_ un goût décevant pour la daube provençale

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