[Edit 22/03/22] : Victor Mercier a très logiquement bien qu'un peu tardivement - décroché sa première étoile au Guide Michelin.
[Edit 08/09/2020] J'avais été emballé par ma première expérience dans le FIEF de Victor Mercier, mais c'était en mode pré-ouverture. Retour donc impromptu dans ce restaurant pour l'expérience carte blanche au comptoir, en condition "normale" !
Presqu'un an après son ouverture, FIEF fait le plein et ne semble pas connaître la crise. Pour profiter d'une place au comptoir et du menu à 70€ pour 6 services, il faut être à l'heure (19h30 ou 21h30) en ayant réservé auparavant sur le site internet, en laissant une empreinte de carte bancaire. Seules neuf places disponibles pour profiter du "show" Victor Mercier. Sinon, il faut vous contenter de la salle (et c'est déjà pas mal !). Me voilà donc à l'heure comme d'habitude. Physionomiste, il me reconnaît de suite. Je suis installé juste devant son poste de travail, vue plongeante sur la cuisine. Un bonheur pour tous les solitaires !
Le seul choix à cette place réside dans les boissons, car pour le menu, c'est le chef qui s'occupe de tout après avoir signalé ses allergies et autres aliments interdits. Je pars donc pour l'accord mets-vin à 40€ (5 petits verres).
Une chance, tous les convives qui sont à peu près à l'heure. En effet, ici, on sert tout le monde en même temps . Un cocktail à base d'herbes et de mélasse nettoie d'abord le palais, histoire d'arriver vierge pour la suite. Pour commencer, un travail sur les carottes en version séchée et fermentée avec une feuille de shiso et une sauce blanche au yaourt. A côté, deux vegans qui auront le droit à leur propre menu adapté.
Pour en revenir à cette mise en bouche, ça commence fort. Les goûts sont prononcés, envahissants dans le palais. Une sorte d'uppercut, pas forcément agréable. Arès avoir bu la petite décoction douce, on est agressé par ces carottes... Violent.
Heureusement, l'armistice sonne dès le plat suivant avec ces Morilles des pins (sparassis), vin jaune, poire fermentée. Ce petit plat sent divinement bon. L'objectif de ce plat était de rappeler le Jura et le comté sans utiliser de fromage... et c'est plutôt réussi. Il y a une complexité rare dans les saveurs dégagées. Un plat "intello" et réfléchi mais surtout très bon !
Pour l'accompagner, on a le droit à un cocktail frais à base de Vermouth, liqueur de citron et vin jaune (entre autres), très agréable.
Sous mes yeux continue de se préparer le reste du menu avec minutie et concentration. Arrive vite la suite : Courge spaghetti, coques, basilic, sauce homard et rajouté dessus, quelques grains de citron caviar. Une création du jour précise le chef. Les narines - les chanceuses - profitent en avance du régal qui suit. Car c'est une petite bombe ! Bien plus gourmandes et consensuelles que la mise en bouche déjà oubliée. Le pain, toujours aussi exceptionnel, me permet de saucer jusqu'à la dernière goutte.
L'anjou blanc, L'échappée du Fief noir, grâce à ses notes tendues se marie bien.
La cuisson de rêve de la Truite de Banka, haricots verts, groseilles blanches, condiment tomatine, courgettes et son accord avec le touraine blanc, Gaïa de chez Divin Loire 2018, poursuivent l'expérience avec une densité de saveurs remarquable. Tout paraît évident, nul trace d'effort... et pourtant !
Déjà le temps du plat de viande (4ème service), après un peu plus d'une heure. Mais on ne voit pas le temps passé, obnubilé par le spectacle offert en cuisine. Volaille rôtie, artichauts, cèpes, sauce coq au vin. Cette fois-ci, ce plat est servi avec un cocktail où repose une tranche de champignon de Paris. Original. Pourtant, en bouche je n'ai pas été convaincu par le goût, un brin sucrailleux, alors que le plat - délicieux - n'attend qu'un beau vin rouge pour faire les bons copains ! Je le signale, et on le sert alors en remplacement un godet de bourgueil, les Gravilices de la maison Amirault. C'est bien mieux ainsi !
On ne faiblit pas sur l'audace quand arrivent les desserts : Melon d'eau fermenté, algues, sorbet aux herbes. Servi avec un pétillant naturel ("R"de chez Kumpf & Meyer), le mélange est parfait. Le côté un peu sucré du fruit se rééquilibre parfaitement grâce au vin ! Là, l'accord prend ton son sens.
Atterrissage en douceur pour ce repas avec les Figues au vin, glace mélilot et thym. On se blottit dans un monde gourmand et bien parfumé, histoire de se remettre de ses émotions. Mais approche 21h30 et le deuxième service qui pointe le bout de son nez. Ils sont déjà là les clients suivants qui poireautent... Voulant un caFIEF (décoction d'orge, sarrasin et chicorée qui remplace le café ici), je suis exfiltré vers le bar pour laisser la place.
Place de choix pour me voir offrir une liqueur de noyau de prunelles, Le Cambusier, excellente !
Mais ce n'est pas fini, puisque le chef veut que je goutte une autre de ses créations avant de partir... ça ne se refuse pas ! Patate douce, mélilot, physalis, sarrasin. Alliance originale et fraîche, mais je trouve le tout un peu trop doux et sans assez de relief... Bah oui, fallait pas me demander mon avis !
Bref, rajoutez à tout ça, une dernière remise de 10% sur l'addition, je paye finalement 99€ cette expérience gastronomique éminemment jouissive ! Indéniablement l'une des tables les plus remarquables faites ces derniers mois. Victor Mercier, éternel insatisfait, ne se repose pas et cherche sans fin la formule magique, dépassant certaines frontières et se mettant en danger permanent.
[review originale 24/10/19] Grâce à Ilya, j'ai pu profiter d'une pré-ouverture très attendue : celle de FIEF (Fait Ici En France), le tout nouveau restaurant de Victor Mercier, finaliste de Top Chef 2018. Un moment de grâce : un tartare fantastique !
La veille de l'ouverture officiel du 24 octobre 2019, le finaliste de Top Chef 2018, Victor Mercier ouvrait son établissement à des connaissances dont Ilya, un instragrammeur qui m'a convié à cette avant-première.
Rendez-vous pris pour 19h45. Dans la rue de la Folie Méricourt, un coin déjà bien fourni en restaurants, pour découvrir ce concept nouveau-né : FIEF pour Fait Ici en France. Le chef a voulu se fournir exclusivement selon les saisons et en France auprès de producteurs métropolitains de confiance.
Dans la rue, la devanture noire et cette grande vitrine donnent le ton : chic et branché. Pour entrer il faut pousser une porte imposante dans le goût de Soulage.
Quand on entre, on arrive dans un espace cuisine et comptoir et grande bibliothèque éclairée en face. C'est très dégagé. Plus loin au fond, la salle avec des tables et une décoration moderne.
C'est naturellement vers le comptoir que je suis dirigé. joie ! Sans avoir de très hauts tabourets, cette position donne une vue plongeante sur tout ce qui se fait derrière les fourneaux. Le spectacle va être au rendez-vous ! Il n'y a que 6 places aussi privilégiées.
Ilya me rejoint, il est temps de jeter un oeil à la carte sur papier recyclé et enrichi en graines, qui se compose en grande partie de "petites assiettes à partager", et seuls trois intitulés nous sont présentés comme des "plats" plus conséquents. Des tarifs dans ce cadre qui paraissent un peu élevé : de 4 à 23€, mais une grande partie des propositions se situent vers les 14-15€. L'avantage de venir à 2, c'est que l'on va pouvoir commander pas mal d'assiettes différentes.
Et ça démarre sur les chapeaux de roue avec cet Artichaut, anguille fumée, capucine et seigle (14€). Jolie présentation, et surtout belles odeurs se dégagent de cette première étape. Le fond baigne dans un jus parfumé constitué notamment d'huile de poireaux. C'est très plaisant en bouche, l'harmonie se fait bien entre les herbes, le goût fumé du poisson serpentiforme (merci Wikipedia!), et le gout d'artichaut. Ce légume, cuit tout juste propose encore pas mal de fermeté. Très joli plat dans l'air du temps.
Le Houmous émulsionné à l'aquafaba et Cacahuète (8€), présenté dans un tout petit ramequin, bénéficie d'une texture légère agréable et le goût des arachides torréfiés se fait bien sentir, un tapas idéal pour l'apéritif d'autant que le pain est juste délicieux avec une mie dense et humide. Cependant, j'aurais bien aimé plus de mordant avec une acidité plus marquée du citron. Remarque remontée qui a toutes les chances d'avoir été entendue par le chef.
Puis, vient le tour de ce magnifique Tartare de boeuf de prairie, vinaigrette à la moelle fumée, estragon, moutarde (15€). Là encore, mes narines me remercient d'être là ! Il y a une véritable odeur sauvage et carnée. La viande qui a été maturée vient de pièces normalement dévolue à la fondue, ce qui lui confère de la mâche et un peu de fermeté. Mais ce goût incroyable en bouche saisit ! L'assaisonnement discret finalement ne fait que pousser le goût de l'excellente viande. Quel incroyable régal ! Bravo !
Si l'Aile de raie en pressé, poireaux grillé, sabayon beurre noisette et oeufs de truite (15€) se révèle plus sage en bouche, ce poisson servi froid témoigne de toute la maîtrise technique du chef. Il y a du boulot dans toutes ces petites préparations. Les assaisonnements sont précis, les cuissons parfaites, le dressage léché. Encore un plat réussi qui s'engloutit sans mal !
En cadeau, le chef nous offre cet Oignon rôti, poire au verjus, girolles, huile verte, orge (12€). Les effluves s'avèrent très agréables. Pas facile de découper le tubercule dans un bol, mais quand on y arrive, c'est délicieux. Des saveurs végétales se marient avec celles des beaux champignons. C'est très plaisant. Le pain en prend encore un coup pour saucer !
Le défilé de jolies assiettes continue avec ce Maquereau, kale, coques et sauce umami (19€). Cette fois-ci, il s'agit d'un "plat". Le morceau de poisson est de belle taille, si bien que je pensais avoir à faire avec de la bonite. Cuisson délicate et parfaite pour le poisson qui dégage des saveurs prononcées. En effet, en amont le poisson a été légèrement séché pendant plusieurs jours de sorte à concentrer ces arômes marins. L'iode des coques vient appuyer ce trait du plat avec bonheur et gourmandise, et chaque petit piment jaune envoie un "mini-shoot" de saveurs sans arracher le palais. Très beau plat !
Place ensuite à la Pintade, tatin de courge, sauce BBq au coing, jus infusé au timut (23€). Les couleurs sont agréables. Je ne suis pas enthousiasmé par le côté pâteux de la part de gâteau de citrouille, mais bine plus par cette volaille 5 étoile justement cuite en basse température ! Pourtant, Ilya et moi restons perplexes devant cette assiette qui a de très nombreuses saveurs qui ne s'accordent pas immédiatement ensemble. C'est bon, mais il y a quelque chose (quoi?) qui empêche d'être aux anges.
Je n'ai pas eu le temps de prendre en photo l'Affiefgato, la version maison de l'affigato (8€), mais sans vanille ni café, mais avec des substituts naturels bien de chez nous, concept du FIEF oblige ! La glace fond vite sous cet ersatz de café (à base d'orge, sarrasin et chicorée), mais c'est plutôt bon. Je pense tout de même qu'un peu plus d'amertume (via la chicorée) aurait été la bienvenue.
Devant moi, la Pomme en millefeuille, lait de riz glacé, riz soufflé. On sent le côté "dessert de cuisinier", FIEF n'a pas de chef pâtissier. Le lait de riz donne un pep's très intéressant à cette pomme fondante, et le riz soufflé joue un peu avec la texture. Pas trop sucré, ce bon dessert termine parfaitement ce dîner.
La carte des vins de FIEF, met en avant des références natures et bio avec des bouteilles à partir de 28€. Après un verre de blanc réjouissant et vif (Lou Fret's du domaine de Jérôme Galaup dans le Tarn à 6€), j'enchaîne avec un verre de roc et Lune 2017 du domaine de Malavieille (6€) au moment du tartare. Léger avec des parfums d'épices, je valide !
Après cette collection d'assiettes de très haute volée (9 en tout pour 2), il y a de quoi craindre l'addition : 101,80€ ! Mais voilà, en raison de cette pré-ouverture, on bénéficie d'une ristourne de 30% sur chaque plat, l'un d'entre eux a été offert et un verre de vin a semble-t-il été oublié (ou offert?). Si on refait les comptes, nous aurions dû payer 153€ pour ce dîner, c'est une toute autre histoire ! Si certains tarifs paraissent pleinement justifiés et visent juste (le tartare, la pêche du jour , la raie...) d'autres paraissent un peu élevés (oignon ou houmous). Mais tout ça fait partie des ajustements qui vont avoir lieu ces prochains jours, tout comme les petits couacs du service qui prend ses marques. Je retiens surtout ce tartare divin, l'audace et le travail dans les assiettes. Autant d'atouts qui font que je reviendrai à coup sûr pour goûter au menu carte blanche dégustation préparés sous les yeux des 6 clients qui auront la chance de pouvoir réserver une place au comptoir à partir de la semaine prochaine. Une expérience alléchante annoncée à 68€ pour 6 services!
FIEF
44 Rue de la Folie Méricourt
75011 Paris (métro Parmentier)
Tel : 01 47 00 03 22
Fermé le midi
Les +:
_ un tartare unique !
_ une cuisine recherchée et surprenante
_ des saveurs respectées
_ des produits d'une qualité rare
_ les places au comptoir
_ pain excellent
_ des "petites assiettes" pas toutes si petites que ça
Les -:
_ le tarif de certaines petites assiettes qui peuvent faire vite flamber l'addition des gros mangeurs (plus maintenant !)
_ cuisine audacieuse, parfois un peu trop?
Serviette en tissus | ✅ |
Changement de couverts à chaque service | ✅ |
Nappe en tissus | ❌ |
Bonne réception mobile | ❌ |
WiFi gratuit | ❌ |
Musique inutile en fond sonore | ✅ |
Adapté pour les enfants bien élevés | ✅ |
Volume sonore moyen | -dB |
Toilettes bien entretenues | ✅ |
Même menu midi et soir (hors formule) | ❌ |
Réservation possible | ✅ |
Vin au verre goûté avant d'être servi | ✅ |