[Edit 27/01/2020 : Pari gagné pour Yannick Alléno puisque Pavyllon décroche une étoile au guide Michelin 2020 !]
Yannick Alléno collectionne les étoiles au Pavillon Ledoyen, et espère bien en glaner une et deux autres avec sa nouvelle table, Pavyllon. Un restaurant très haut de gamme mais qui mise aussi à fond sur la convivialité !
Le Pavillon Ledoyen par Yannick Alleno, c'est 3 étoiles. Pour Abyss sa table nippone située juste à côté, c'est 1 macaron. Alors quand un troisième restaurant - Pavyllon - prend ses quartiers dans une autre aile du bâtiment qui donne sur les Champs Elysées, on peut s'attendre à du haut niveau immédiatement étoilable.
Après un passage dans un vestibule d'accueil, on découvre la salle composée essentiellement par un comptoir gigantesque avec une pleine vue sur la cuisine et la brigade toquée. Il y a bien quelques autres petites tables, mais elle sont rares et ne bénéficient pas du même spectacle. Il faut d'ailleurs les réserver spécifiquement. Cependant, mieux vaut apprécier la promiscuité tant chaque place est collée à l'autre. C'est original pour un restaurant de ce niveau de proposer cette configuration. D'habitude, quand on paye des sommes rondelettes pour un repas, on peut aimer la tranquillité. Ici, c'est une autre option plus conviviale qui est privilégiée.
Car oui, ce midi, ma carte Bleue va prendre un coup de chaud, ma banquière va défaillir, et Cofinoga va se frotter les mains (ou presque). Si un premier menu déjeuner en 3 services s'affiche à 68€ (une aubaine !), les tarifs flambent vite dans les pages suivantes : les entrées en "version dégustation" (comprenez qu'il faut en prendre deux ou trois) vont de 19€ à... 129€ ! Les plats pour leur part naviguent de 34 à 94€.
Bien entendu, les menus dégustation peuvent s'avérer de bonnes alternatives quand on ne connaît pas une carte : 145€ pour 5 services et 235€ pour 7 services. Des prix dignes d'un 1 ou 2 étoiles Michelin. L'ambition est bien là. Les intitulés laissent entrevoir un peu plus de fantaisie et de créativité que pour la table 3 étoiles d'à côté.
C'est parti pour le petit chelem aussi appelé "Menu Champs Elysées" : 5 services avec l'accord mets vin (+73€ pour 4 verres).
Pendant mon choix, la place devant moi se réduit : dans une coupelle, 3 olives avec une feuille du laurier "du 8ème arrondissement", une crème d'artichaut servie avec 3 beaux gressins maison et enfin, une petite miche de pain maison et un beurre Bordier du genre à vendre son âme pour en avoir un peu plus! Pour une fois, on ne joue pas les chichiteux à servir avec parcimonie le pain, on vient ici pour se faire éclater la panse j'ai l'impression ! Les olives fraîches réveillent bien les papilles, tandis que la crème régale mes envies de gourmandise!
Dans cette configuration, le voisinage peut s'avérer déterminant pour profiter au mieux de l'expérience. C'est un peu comme attendre avec angoisse, qui va s'asseoir à côté de soi dans un avion... Et très vite je suis fixé car Pavyllon se remplit à vitesse grand V ! A ma droite, trois retraités sympathiques qui ont le bon goût de ne pas avoir vidé leurs flacons d'after-shave ou d'eau de Cologne, et à ma gauche, deux amis quarantenaire, un rien flambeurs mais aussi agréables ! Ouf !
J'entame mon menu onéreux par l'émincé à cru de saint-pierre mariné au persil, brunoise multicolore et herbes. Pour l'accompagner, un tokay sec de chez Mandolas. Un vin excellent et vif qui vient apporter du relief à l'assiette qui sinon en manquerait cruellement. Cet accord parfait transforme cette entrée en petite merveille fraîche et enlevée. A chaque bouchée, des saveurs différentes prennent le dessus, c'est joyeux et vigoureux.
Le plat suivant est assorti d'un record. Jamais je n'avais vu de supplément pour un plat à ce tarif-là : si vous rajoutez la modique somme de ... 94€, je peux avoir de la truffe blanche sur mon Soufflé au fromage cuit à la vapeur, foie gras, sauce albufera. On va faire sans ! Et déjà sans champignon, ça donne faim ces belles odeurs. Réalisation parfaite et goûts profondément gourmands. On ne tergiverse pas, on câline. C'est délicieux. La sauce (foie gras poivron rouge) à elle seule est affolante. Quel bonheur ! Evidemment, je sauce avec précision mon assiette pour n'en gâcher aucune goûte.
Bel accord avec ce saint joseph Couronne de Chabot par Yannick Alléno (tient!) et Michel Chapoutier, l'un des vignerons stars. Mais je dois économiser ce verre car il doit se partager avec le poisson qui suit...
Je vois juste à côté de moi, l'incroyable pithiviers au lèvre mariné. Houlala ! Il a l'air incroyable ! C'est sûr, je reviendrai ici rien que pour ça ! C'est l'avantage de partager le comptoir, on voit avec précision les assiettes des autres convives, de quoi donner des regrets ou des envies.
Avec Pavyllon, le chef Alleno développe une identité à part entière avec de petites originalités comme ces tempuras de légumes à tremper dans un bouillon dashi et daïkon formidable. Ces petites bouchées sont délivrées pendant les plats à tous les convives et en plusieurs fournées et sont à manger avec des baguettes. Radis, oignons, shimeji, radis, endives... des petites bombes délicieuses !
Belle surprise, moi qui avais mon verre presque vide, je vois qu'on m'en apporte un autre - offert - de meursault. Je ne vais pas cracher dessus même si ça fait deux jours de suite que j'en bois ! Les Chevalières 2017 de Xavier Monot. Excellent vin qui fait mouche avec ce plat d'une gourmandise inouïe : Filets de rouget en éventail, duxelles de cèpes!
Beurre mousseux merveilleux, cèpes délicieux, peaux des petits rougets croustillantes et carrément canailles. Sans doute le meilleur plat de poisson dégusté cette année !
Ça s'amuse pour le plat de viande : Filet de pigeon rôti au genièvre, champignons marinés, gels et condiments. Préparée rosée (on m'a demandé quand même à la commande si ça m'allait!), la viande est entourée de petits condiments bien goûteux : purée d'olive, mûre, cassis, pickles de girolles, figue. A chaque bouchée on choisit l'un d'eux, et avec le beau jus, on obtient une collection de saveurs bien typées. Impossible de s'ennuyer, et à chaque instant un vrai plaisir gourmand.
Doublé par un bel accord avec ce vin de l'Hérault, le Galibaou du russe du Domaine Vaisse. Tanique et épicé sans outrance, il s'est avéré bon compagnon. C'est juste mon 4ème verre ! Hips !
Puis, le chef pâtissier Aurélien Rivoire entre en scène. En attendant le dessert prévu à la carte (un parfait café pistache) je vois que se prépare un petit cérémonial avec un flambage à l'alcool. Le chef vient devant moi dresser cette magnifique crêpe soufflée façon suzette. Plus qu'un pré-dessert, c'est un test avant de le mettre à la carte. Et c'est une réussite tant en légèreté, en équilibre et surtout en gourmandise! Je vote pour !
Puis s'enchaîne le Parfait glacé au café et à la crème de pistache salée, brioche fleurée. Dressage aux cordeaux. Les desserts au café sont la marque du chef Rivoire qui a remporté le Lebey du meilleur dessert au café en 2019. Et je découvre avec bonheur cette création. L'alliance café-pistache avec cette pointe de sel fonctionne parfaitement. Il y a du pep's, de la gourmandise et des saveurs profondes.
L'accord se fait avec un vin de dessert mais pas très sucré mais avec une longueur en bouche remarquable : un Madeire Barbeito, boal reserva. Une jolie découverte qui va presque naturellement de pair avec le dessert.
Mais les belles émotions ne sont pas terminées car avec cette mini-tartelette à la bière façon crème brûlée, j'en suis encore tout retourné! Cette mignardise mélange le meilleur du goût des crèmes brûlées avec celui... des crêpes ! Je fonds de plaisir !
Puis, deux heures après mon arrivée, il est l'heure de voir à combien se chiffre exactement cette aventure gastronomique : addition à 218€ ! Pas de surprise. J'ai bien fait de ne prendre qu'une carafe d'eau et d'éviter l'assiette de fromages à 20€. Ayant pu voir cette dernière, chiche et sans folie, elle ne vaut pas le détour. Mais si je fais le bilan, Pavyllon m'a comme rarement enthousiasmé! Les plats décomplexés d'une précision chirurgicale sont des régals véritables ! Est-ce que ça vaut ce prix-là : oui. Maintenant, il faut apprécier cette promiscuité et espérer côtoyer des personnes agréables au comptoir.
Pavyllon
Pavillon Ledoyen
8 Avenue Dutuit
75008 Paris (métro Champs Elysée Clémenceau)
Tel : 01 53 05 10 10
Fermé le samedi et le dimanche
Les +:
_ cuisine exceptionnelle
_ une gastronomie qui cherche à faire plaisir à chaque instant
_ le service de très haut niveau
_ accord mets-vin très réussi
_ générosité et petites surprises (verre offert, dessert en plus...) qui font bien plaisir
Les -:
_ la promiscuité au comptoir
_ la musique de fond est complètement inutile
Serviette en tissus | ✅ |
Changement de couverts à chaque service | ✅ |
Nappe en tissus | ✅ |
Bonne réception mobile | ✅ |
WiFi gratuit | ✅ |
Musique inutile en fond sonore | ✅ |
Adapté pour les enfants bien élevés | ❌ |
Volume sonore moyen | 61dB |
Toilettes bien entretenues | ✅ |
Même menu midi et soir (hors formule) | ✅ |
Réservation possible | ✅ |
Vin au verre goûté avant d'être servi | ✅ |