Le mythe des restaurants à tapas à l'espagnole avec ses petites assiettes délicieuses qui s'enchaînent et s'entassent sur la tables à petits prix faits toujours rêver le Parisien. Alors, de nouvelles adresses comme Amagat se lancent dans l'aventure, les petits prix en moins.
Imaginez vous engouffrer dans une vieille voie privée et pavée où les mûrs des bâtiments industriels encore debout sont recouverts de dessins joyeux sortis de l'imagination fertile de graffeur. Aucune indication d'un restaurant. Rien. On avance sans vraiment savoir. Puis on suit le chemin, tout au fond, oui, là-bas où la végétation reprend ses droits, et là une grille. Amagat.
Derrière une musique "andalouse"(??). Et des tables qui jalonnent une terrasse terriblement romantique. Je touche au but ! encore une table de partage que vais faire seul ! Youpi, j'ai à nouveau très faim.
Le menu, pour vraiment nous immerger dans cet univers hispanique est rédigé en espagnol... sans les prix. Des charcuteries, des croquettes, des grillades, tout ça donne faim. Pour savoir combien tout ça ça coûte, il faut regarder sur un autre papier avec lequel un crayon est fourni. Hé oui, comme dans les buffets à volonté chinois, il faut remplir un papier avec les quantités voulue pour chaque tapas. Ainsi, l'anchois (unique) est tarifée 2 euro pièce, le pan con tomates 6€, la bomba 10€ (gloups...), et ça monte comme ça jusqu'à 21€. Il y a aussi des suggestions du jour qui sont annoncés par un serveur top niveau (bravo à lui pour son dynamisme, sa bonhommie et son efficacité trop "cool"). Là, on n'a pas les prix. Bref, tel un Yves Klein de pacotille, je fais un saut dans le vide, et commande sans trop savoir tous les prix ni les quantités servies...
Très vite arrive ma première assiette : Légumes grillés au barbecue (12€). Dans un plat en métal, un joli assortiment coloré : courgettes, aubergines, poivrons, tomates.... De très belles notes fumées se dégagent. Les cuissons se révèlent idéales. Voilà un plat qui doit réconcilier tous ceux pour qui les légumes riment avec ennui ! Là je me régale.... mais pas le temps de s'extasier que ma deuxième assiette arrive. Hé oui, avec ce mode tapas, toutes les assiettes arrivent quand elles sont prêtes (et nous pas forcément).
j'entame le repas avec un pet' nat' espagnol, Memoria Descegrut. Un joli vin d'entame du repas... à 13€ quand même.
Les croquetas, un incontournable des tapas, arrivent donc. Ici, on nous promet du jambon ibérique à l'intérieur ! Miam ! J'en ai pris 2 (3,5€ pièce). La texture de la croûte est parfaite ! Elle croustille ! Cric ! Crac ! Et là, petite déception : là où je m'attendais à de une gourmandise folle, je me retrouve avec une farce un peu fade et trop peu salé. Je vois bien les bouts de jambon dedans, mais au goût, il n'y a plus grand monde... Dommage.
A côté, deux jeunes femmes, journalistes parisiennes apparemment avec tous les tics de langage qui vont avec "tu vois". L'une des deux semble amie avec le serveur. Ca tutoie sévère en tout cas !
Là, c'est l'une des suggestions du jour qui pointe le bout de ses pétales : Maquereau cru et eau de tomate. Que c'est beau ! On n'est plus dans la tradition des tapas espagnols, mais plutôt dans le domaine où excelle le chef Sylvain Roucayrol. Je me souviens encore avec émotion de mon déjeuner chez Mara aujourd'hui fermé.... Le poisson cru, les beaux produits de saison, voilà où ce chef atteint des sommets ! Ici encore, c'est une pleine réussite. Fraîcheur, saveurs, jeu de texture, tout y est pour régaler les papilles.
Ce dimanche soir, la terrasse pleine est occupée par pas mal de monde de la restauration (comme d'habitude!). Ca cause travail forcément.
Voici ensuite la bomba : croquette de purée de pomme de terre, ragout de porc, aïoli et sauce pimentée. Sur le papier, ça dépote ! A 10€ le gros beignet, il vaudrait mieux ! Là encre texture parfaite. C'est maîtrisé techniquement cette affaire. La sauce pimentée vient bien relevée la croquette qui sinon serait trop fade, à nouveau. C'est sympa, mais pas aussi bon que je le pensais...
C'est bien mignon tout ça. J'en suis à 4 assiettes (et 1 à venir), dégommé toute la bannette de pain et je suis toujours affamée. Bon, je commande en avance un autre plat. Je vois des côtelettes d'agneau, bingo ! Bon, on s'étonne de me voir encore un plat. Fait dire que je suis le seul gros visiblement de TOUT le restaurant. Ici, le slim, c'est la norme.
Mais voilà la Joue de boeuf bisque d'étrilles et homard. Haaaaaa ! Là, on change de calibre, enfin un vrai plat propre à caler une dent creuse. Niveau équilibre évidemment, c'est moyen. Je n'ai qu'une (grosse) joue de boeuf qui a été cuite très lentement et recouverte d'une sauce onctueuse et bien odorante. J'en salive encore ! Aucun accompagnement pour 18€.
La fourchette se fiche toute seule et sans effort dans le beau bout de viande. C'est fondant à souhait, et les notes terre-mer de ce plat me comblent d'un petit bonheur. Délice.
Pour accompagner les viandes, je demande un autre vin, plus "corpulent" avec de la "structure"... Mais voilà à la carte, un bon nombre de glouglous qui ne répondent pas à cette définition. Finalement, le serveur me trouve un vin français, plutôt pas mal (mais pas encore aussi robuste que voulu avec ce genre de plats...) à 10€.
Mes 3 Côtelettes d'agneau marinées (21€) se présentent à moi. Pleines de saveur notamment grâce à la marinade et la cuisson barbecue, je prends grand plaisir à les dévorer, me laissant entrevoir à quoi peuvent bien ressembler des vacances...
Comme prévu, le vin n'est pas suffisamment costaud face à ça. Mais bon, je ne suis pas bégueule !
Pour le dessert, pas un choix infini.
ET là, nous allons jouer au juste prix ! Imaginez un demi-melon de taille moyenne, pas particulièrement parfumé, qui a été vidé (à la perfection) de ses pépins et dans le centre duquel a été versé du vermouth. Calculez la somme de travail considérable qui se cache derrière ce colossal dessert, le prix d'une matière première de luxe, et vous obtenez quel tarif à votre avis ??
11 fucking euros tout simplement. Voilà qui pique un peu. Ca ne va pas arranger la note finale cette histoire !
Et effectivement, la douloureuse tombe (après pas mal d'attente) : 112€... Je couine intérieurement. Me lamente. Me remémore les quelques bons moments de ce repas car il y en a eu (les légumes, la joue, le maquereau, le service, le lieu....) mais les oppose aux moins bons (les croquetas, la bomba, les prix, la carte des vins trop glouglou), et mon avis final en devient mitigé. Découvrir seul Amagat fait perdre du charme au concept taillé pour des repas festifs entre amis et/ou amoureux.
Amagat
23 Vla Riberolle
75020 Paris (métro Alexandre Dumas)
Tel : 06 09 31 61 62
Fermé au déjeuner, le lundi et le mardi
Les +:
_ terrasse pittoresque fantastique
_ service au poil
_ certains plats délicieux
Les -:
_ la note finale qui flambe très vite si on ne veut plus avoir faim en sortant de table
_ certains plats décevants
_ une carte des vins nature espagnols portés sur le glouglou d'apéro pas forcément en adéquation avec certains plats proposés
_ le dessert qui se fout un peu de notre gueule à 11 balles