Le restaurant Solstice m'avait franchement emballé, alors quand son chef MOF Eric Trochon s'implique dans une nouvelle affaire, je m'y rue ! Direction Otto, rue Moufetard.
Par Arnaud Morisse
C'est de plus en plus difficile de trouver de nouveaux restaurants ouverts le dimanche ou le lundi. Heureusement, Otto, nouvelle adresse de la rue Moufetard, reste ouvert 7 jours sur 7. En plus, c'est Eric Trochon qui signe la carte, alors, je ne peux qu'y foncer en m'y délectant d'avance.
Il faut grimper la rue, passer la Contre-Escarpe (tient, pas loin se tient l'excellent Narro !), et là, se dresse Otto.
Adresse à la mode du jour : néons en vitrine et une carte composée des "petites assiettes à partager", enfer des solitaires outre-mangeurs dont je fais partie. Pourtant à l'intérieur, tout semble favorable à un repas en solitaire : il n'y a que des places en comptoir - ou presque, car 4 petites tables se terrent au fond du restaurant dans une pénombre pas très agréable.
Au milieu de la longue salle se trouve la cuisine. Chouette ! Un maximum de places au comptoir ! Mais figurez-vous que je renonce à m'y installé me rendant compte de la configuration : comptoir certes mais un muret qui arrive à hauteur des yeux masque entièrement la cuisine. Ca revient donc à manger devant un mur gris et avec un minimum d'espace, complètement oppressant. Les places se situant dans un couloir étroit, on a même la joie et le plaisir d'être frotté toute la soirée par le passage...
Bref, je fais un refus et me réfugie, à la lumière, là où il y a un peu d'espace pour respirer : le bar. Une poignée de tabourets hauts permet de s'installer. Et de là, on peut apercevoir la cuisine (au prix d'un torticolis peut-être...?) Une configuration de salle pas franchement heureuse voire carrément absurde. Avoir les désavantages du comptoir sans les avantages... Incompréhensible.
Sur la carte, je m'y retrouve plus : quelques abats, du cru, du cuit, des intitulés qui donnent faim de 8 à 20€. Je m'étonne cependant de voir que des huîtres Gillardeau sont aussi proposées... Des triploïdes (non naturelles) donc... 11€ les 3.
Les assiettes arrivent quand elles sont prêtes. Bref, pour manger chaud, je vais devoir "speeder" comme on disait jadis pour faire jeune. Je commence avec les Barbajuan de blettes. Pas de couvert pour commencer, tant mieux, ça se mange à la main. Ces beignets frits de blette croustillent bien. On sent bien le légume. Cependant, c'est un peu fadouillat, ça manque de sel. La sauce blanche ne présent pas un grand intérêt. Correct. 10€ tout de même.
Côté vin, il y a une jolie sélection de vins bien faits qui ne cherche pas à tout prix la nature. Je me fait servir en même temps un verre de vin rouge ( languedoc de Marc Kredenweiss, les Grimaudes) et un verre de blanc (domaine du Pas de l'Escalette, Clapas) vu que les assiettes vont arriver dans le désordre...
L'assiette suivante me fait saliver illico : la broche de cochon. Cuite façon kébab après avoir été marinée, la viande est débitée minute avec une sauce aux herbes et une harissa maison. La quantité fait plaisir à voir. Il y en a pour 15€. C'est plutôt bon, même si la sauce manque vraiment de mordant. Avec un peu plus de piment, ça pourrait être un grand moment gourmand... mais non. C'est juste bon.
Place ensuite à une rareté : les beignets de... rognons de coq ! Oui, oui, les roubignolles du gallinacé frites dans une pâte à beignet. Je n'en n'avais jamais mangées, et je ne pouvais pas passer à côté de ça ! Une nouvelle fois, ça croustille.... et là, c'est fade. Ca manque vraiment d'assaisonnement. Le condiment au poivron ne rattrape pas le coup. 12€.
C'est du poisson qui suit : un filet unique de maquereau coupé en 2 et cuit au binchotan avec un condiment citron. Dans l'assiette noire, ça fait chiche. 14€. Gloups. Heureusement ici pas de faute d'assaisonnement, c'est très bon quoiqu'un peu trop cuit. Un goût de trop peu.
Heureusement le pain est délicieux.
C'est pas le tout, mais pour un dimanche soir, la salle se remplit à ras-bord. J'apprends ainsi qu'il existe au sous-sol une table d'hôtes qu'on peut réserver.
Haaaa ! LE PLAT emblématique de la cuisine française est disponible ce soir! Le lièvre à la royale ! Rien que ça. Il m'en coûte 20€ supplémentaires. Comme le reste, c'est joli tout plein. La sauce est nappante et onctueuse. Mais, car il y a encore un mais : je ne comprends pas pourquoi la purée de céleri dans l'assiette est froide. Je demande si c'est une erreur, et le chef me confirme que non, c'est voulu. Ha? En plus, le tout est bien trop salé, pas agréable du tout.
C'est pas le tout, mais avec 5 mini-assiettes, mon estomac réclame ! C'est bon, calme-toi petit, tu vas avoir du rab'. Deuxième prise de commandes....
C'est donc du saumon qui suit mon aventure du soir : en gravelax betterave. Je m'étonne de voir autant de gras dans la chair du poisson souvent synonyme d'une qualité pas optimum. C'est classique mais bon, sans surprise. 12€.
Suivent ensuite les Couteaux au beurre d'ail. Magnifiques ! Les bestioles sont cuites à la perfection et demeurent encore gorgées d'iode. C'est incontestablement le meilleur plat de ma soirée, et pour 10€ seulement !
Un petit dessert express : Riz au lait au caramel. Classique, bon même si un brin de sel aurait pu donner un peu plus de relief. 7€.
C'est l'heure de partir, moins d'1h après mon arrivée. Ici, les assiettes défilent à un rythme effréné. On s'en rend bien compte en étant seul. Pas de café ("la machine arrive la semaine prochaine") et l'addition arrive : 119€! Imparable ce système de petites assiettes pour faire flamber la note. Le prix d'un étoilé (Solstice m'avait coûté.... 57€ au déjeuner!) pour un repas loin d'être aussi parfait qu'attendu. Une disposition de salle étrange, des assaisonnements hasardeux, une note finale qui fait suer le banquier, bref, une grande déception pour mon dernier restaurant testé de 2022... Espérons que je n'ai juste fait qu'essuyer les plâtres.
Otto
5, rue Mouffetard
75005 Paris (métro Place Monge)
Ouvert tous les jours
Les +:
_ service ultra efficace et sympathique
_ carte des vins bien pensée
_ des plats rares (Rognons de coq!!)
_ des assiettes jolies tout plein
Les -:
_ disposition de la salle absurde avec ces murets au comptoir qui oppressent et masquent la vue sur la cuisine
_ des assaisonnements hasardeux
_ une addition qui flambe vite avec les petites portions servies