[Edit 07/03/23 : Le nouvel Astrance de Pascal Barbot arrive tout de même à décrocher une étoile...]
Des mois qu'on attendait ça : l'Astrance de Pascal Barbot rouvre ses portes ! Ni une, ni deux, je suis dispo, c'est ouvert et j'ai même une table ! Dommage, je suis resté "à quai"...
Par Arnaud Morisse
Les grands établissements gastronomiques sont toujours l'occasion de graver en mémoire pour toujours, des souvenirs inextinguibles : le happening de Plénitude, les produits fous de Table de Bruno Verjus, l'inventivité folle de Kei, le velouté truffe-artichaut de Guy Savoy... Et avec l'Astrance, j'espère bien rallonger la liste !
Des mois que j'attendais ça, j'ai tellement entendu parler de ce restaurant qui a été triplement étoilé des années durant sans jamais avoir pu y aller, je vais enfin y atterrir !
Finie la rue Beethoven, bonjour la rue de Longchamp. Devanture chic sans être ostentatoire. Pascal Barbot a choisi une salle bien plus grande tout en gardant son âme et avec pour objectif de très vite raccrocher des macarons à son tablier. Accueil on ne peut plus courtois et souriant, avec le mot d'esprit qui va bien !
Le menu déjeuner est à 125€. Le soir, ça grimpe à 285€, l'ambition est clairement affichée. Pour parfaire le tout, on est tout fier de m'annoncer que dorénavant (ce n'était pas le cas avant donc...), oui, oui, énoooooorme nouveauté, on peut choisir à la carte ! Dingue ! Evidemment, cette option a un coût certain : entrées de 65 à 135€, plats de 85 à 125€. Aussi, on peut toujours profiter de son fameux croque-monsieur au Saint Nectaire, sa signature sympathique que j'avais eu l'occasion de goûter lors de sa résidence chez Cena.
La carte des vins donne le tournis : il ne semble rien y manquer ! des références envoient du rêve !
Evidemment, je veux en avoir plein les papilles ce soir et c'est donc tout naturellement vers le menu que je me tourne avec un accord mets-vin avec (supplément de 110€) où je précise que j'aime les découvertes ! Bref, attention les yeux !
Et là, il y a comme un bug dans la Matrice. Je vois arriver l'amuse-bouche : une assiette qui ressemble plus à une bonne blague qu'autre chose : c'est l'histoire d'une demi-tranchette de kiwi, d'un morceau de shiitake, d'un bouquet d'herbes sans assaisonnement et d'un rondelle de carotte qui se retrouve dans une assiette qui paraît bien trop grande (et elle ne l'est pas....). Ha (à prononcer comme Denis Brognard). Me voilà interloqué. Je ne vois pas bien ce qu'il y a de sorcier là-dedans. Peut-être des assaisonnements cachés de folie? Des trompe l'oeil? Non ! Rien du tout. La mini-tartelette au comté ne rattrape pas l'affaire. Aucun intérêt.
Dans la salle (pleine) on s'esbaudit, on parle fort (surtout à une table en face de moi, avec une grosse voix grave) et à côté, on s'enjaille sévère avec une petite boutanche de champagne Salon. Comptez 4 chiffres pour le tarif...
Quand je vois arriver la suite, je regarde tout de suite autour de moi : c'est pas possible, il y a certainement des caméras cachées quelque part, Marcel Beliveau attend en cuisine avant de sortir avec un grand "Surprise sur Prise" ! Mais non. Dans une assiette qui paraît à nouveau gigantesque (pourtant 18cm de diamètre...) 5 crevettes. Des bouquets, mais de la taille de crevettes grises. Quand on en pêchait avec mon Papa, cette taille-là, on les rejetais à la mer, trop petite. Mais là, non, on nous les sert. Bon, bah, à part la tête je mange tout, flemme de décortiquer. Next.
Heureusement, le pain - Poujauran - est délicieux.
La suite du "plateau de mer décomposé", ne me fait pas plus rêver : 1 (oui, 1!) bulot agrémenté d'ail noir je crois, un mini-tartare et une palourde. C'est plutôt bon, même si on joue à Polly Pocket avec ces mini-trucs qui s'avalent en 1 bouchée. A côté, un toast biscornu à la crevette et tomate qui croustille bien. Aussi, 3 lamelles de poisson mariné. Sympathique.
Pour l'accord, on me sert un mini-mini verre (6cl max) de chablis. Point de vue surprise et découverte, on repassera. L'Humeur du temps 2016 de chez De Moor. Très bon et surtout super accord pour la suite (oui, j'ai réussi à préserver une mini-gorgée).
Donc, avec cette Saint-jacques et Moelle, c'est très bon ! Même si j'ai dû attendre un peu puisqu'on m'a servi ce plat avec des huîtres chaudes. Mais petit soucis, je suis allergique comme signalé à la réservation, à mon arrivée, et à la prise de commande. Là encore je crois en une blague, mais non. Bref, cette demi-saint-jacques avec cette goûte de vin passent très bien.
Je vois que la grosse voix du fond là-bas, a commencé à tenir la conversation avec le couple de la table d'à côté. A coup de "Moi, je", cette voix de stantor résonne dans la salle.
Heureusement, le pain est bon. Alors, à coup de 1 petite tranchette par petite tranchette, on m'en ressert.
Je commence- déjà- à trouver le temps long. Ca ne fait pas 30 minutes que je suis arrivé.
Entracte avec un riz (poli) koshihikari sauce oursin. C'est délicieux ! Tout petit, mais follement bon ! Voilà un kiffe ! Qui me rappelle.... mais oui, ce même riz avec une sauce miso et beurre blanc mangé chez Cena par Pascal Barbot !
C'est déjà l'heure du poisson. Rien que d'y penser, je reprends du pain, vite ! Barbue radis huile de persil. Un petit pavé cuit à la vapeur, une sauce de poisson, de l'huile de persil et des radis/navet crus en tranchettes. La cuisson est limite trop poussée. La sauce est bonne. Zut! J'ai plus de pain !
Pour le mini-verre d'accompagnement, le joli traminer de Stéphane Tissot. Toujours 6cl. Snif.
Ha, le chef est en salle, à la fameuse table au vieux à la voix grave. Et ça parle, et ça parle.... Le temps même de voir arriver "l'étape végétale".
Ha c'est bien ça de mettre en avant les légumes ! Bon, là, pas vraiment de surprise : Céleri braisé, cerfeuil tubéreux, sauce oignon grillé. C'est bon mais convenu.
J'ai quand même le droit à un accord avec cette étape : un cidre suisse de la cidrerie du Vulcain. Toujours 6cl. C'est bon, et l'accord est original.
Tiens, je vois enfin à qui appartient la grosse voix : Pierre Arditi. Ok. Il a l'air d'être un habitué.
Pour la viande : Chevreuil airelles. Du classique. Jolie cuisson comme j'aime. Les notes aigrelettes des airelles sont top, mais voilà, c'est le drame : ça manque de sel, c'est plat et simplement acide. Et donc, j'en arrive à une extrémité impensable dans un restaurant de cette trempe, je demande... du sel. Petite panique, du sel? Où ça y-a du sel? Et voilà qu'on en trouve, et franchement ça va beaucoup mieux avec. Il n'y a pas photo.
Pour le coup et pour se faire pardonner, on me sert à 2 reprises 2 mini-verres de La Papesse en Vinsobre de chez Gramenon. Un très bon vin.
"Pré-dessert ou fromage, on n'a pas encore décidé" s'amuse-t-on au service de cette neige de roquefort et sorbet persil. C'est étonnant et pas mauvais. On retrouve le bout de kiwi jaune de l'amuse-bouche.
Puis arrive le dessert : Pulpe de yuzu givré, mandarine kampei, lime de Tahiti. Une sorte d'orange givrée en fait avec une base de yaourt grec. Avec, un DEMI-gâteau nantais. Je m'en réjouis quand on annonce l'intitulé et je dis "avec du rhum" en faisant une danse de la joie dans ma tête vite refroidie par la réponse du serveur me faisant entendre qu'en fait, non, point de rhum... (et donc pas de gâteau nantais mais). C'est sympathique. Un dessert à la carte facturé 45€. C'est propre.
Mon accord mets-vin se termine par un saké français. Voilà, ça c'est originale ! En plus, une référence que je ne connais pas (Lou Guichou) ! Bon, ça ne va pas avec ce dessert, et puis, il sent franchement pas la rose ce truc, et puis il n'a pas vraiment le goût de saké, mais je salue l'effort. J'apprécie mes 6cl à ce titre.
Pour le café, je demande comme d'habitude quel est le torréfacteur avant de me retrouver avec un Nespresso à 12€ ! Ouf, renseignements pris (visiblement, on ne leur a pas beaucoup posé la question....), c'est la maison Lomi qui régale ! Chouette ! Avec, un lait de poule très bon et une petite tuile chocolatée top ! De quoi me ragaillardir avant de voir arriver la douloureuse...
390€ ! Gloups. Franchement à 1000 lieues de ce que j'ai mangé et bu ce soir. La cuisine simple et peu assaisonnée ne fait pas vibrer, aucune découverte (hormis la neige de roquefort), des produits certes de qualité mais pas incroyables, du classique pas spécialement gourmand, des vins servis "avec parcimonie", du pain excellent qu'on doit quémander... Bref, seul le service - même avec la bévue des huîtres - rattrape l'expérience. Bien entendu, j'ai dit tout ça au chef qui n'a pas manqué de faire son tour de salle. Je crois que mes remarques l'ont un brin chafouiné. That's life !
Astrance
32 Rue de Longchamp
75016 Paris
Tel : 01 40 50 84 40
Fermé samedi et dimanche
Les +:
_ carte des vins de folie !
_ pain excellent
_ service digne d'un étoilé
_ café Lomi
Les -:
_ cuisine simple sans grande surprise
_ plat qui manque de sel
_ les mini-verres de vin de l'accord, ça fait mesquin
_ rien de scotchant et donc hors de prix