Indéniablement Stéphanie Le Quellec a un talent immense. Après le succès de sa Scène, voilà qu'elle a ouvert avec son mari, Vive, un restaurant de la mer en lieu et place du célèbre Rech qui avait été repris par Ducasse et ses équipes. Une adresse qui devrait pas être loin du macaron Michelin en 2023 !
Par Arnaud Morisse
De tous les vainqueurs de Top Chef, Stéphanie Le Quellec est sans doute celle qui s'en tire le mieux grâce à un talent d'exception. Orné de 2 étoiles, son restaurant La Scène continue de faire le plein, même si, bégueule que je suis, j'y avais trouvé détails à redire.
Avec Vive, elle partage le projet avec David, son mari. Pour ouvrir une adresse de la mer, quoi de mieux que de racheter un autre célèbre (et étoilé) lieu de la mer? C'est ainsi qu'ils ont mis la main sur Rech, un resto bourgeois et classique qui était réputé aussi bien pour sa cuisine, ses plateaux de fruits de mer et ses poissons frais que ses additions qui feraient défaillir les Arpagon de toutes sortes.
L'endroit est toujours aussi élégant, et le rez-de-chaussée - dévolu à la partie "bistrot" n'est pas sans rappeler son équivalent de La Scène. J'arrive et m'annonce, on m'invite à grimper à l'étage. Là, je suis accueilli par une charmante femme aux faux airs d'Inès de la Fressange dont elle partage cette même belle élégance. Me voilà installé. à 12h30, un mardi 28 décembre, la salle est déjà bien pleine. Déco élégante avec une oeuvre à base de coquillages aux murs. L'espace sonore est comblé par du Chet Baker, je pardonne. La clientèle s'avère bien née et âgée, mais pas que. Cette période de l'année est aussi propice aux couple débarrassés des chers anges placés chez les grands parents.
Du côté de la carte, les tarifs sont coquets : plateau de fruits de mer de 130 à 145€, anchois frais marinés à 18€, soupe de roche à 21€, saint jacques à 38€, 3 Gombos (de grosses crevettes...) à 48€ et des desserts qui grimpent jusqu'à 22€! Le tout présenté avec l'argument à la mode ultime : "la cuisine de partage". Dans le monde du partage vous avez 2 camps : les mini-assiettes où le partage est plutôt vain où celui des beaux plats où l'on peut y aller aisément à 2 ou 3 sans se résigner à ne goûter qu'à une unique bouchée.... J'espère qu'à ces tarifs-là, on se situe dans la seconde catégorie !
J'entame mon déjeuner par des praires farcies, visiblement une spécialité du lieu. Six coquillages sont ainsi disposés sur un lit de gros sel. C'est très joli, à ce prix-là, vaut mieux ! 22€ quand même! Au goût c'est bon, sans être "whaou". En plus j'ai eu de droit à un peu de sable. Mais ça ouvre bien l'appétit, même si j'avoue que dans un restaurant de ce niveau je regrette l'absence d'un amuse-bouche.
Côté vin.... bah rien. Le cru commandé tarde à venir si bien que j'ai avalé mes 6 coquillages à l'eau ! Pas bien grave. Impossible d'en faire part à la cheffe de salle qui a déserté la salle... quand elle arrive finalement, m'expliquant qu'elle n'arrive pas à remettre la main sur la bouteille demandée (d'où son absence), se confondant en excuses. Pas dramatique, je me rabats sur un must : le Buisson de Bonnigal Bodet en 2018 à 14€.
Arrive vite ensuite le Thon rouge pistou menthe coriandre. Un plat à 28€ qui ne mégote pas avec la quantité. Il y a de quoi partager ! C'est joli et ça sent très bon. Sauce Ponzu bien relevée, et assaisonnement parfait. Les tranches de poisson sont découpées au millimètre, c'est un job d'une remarquable précision. Je me régale. Avec le pain de chez Lalos j'en profite pour saucer mon plat !
A la table d'à côté, un vieux monsieur à la voix grave qui porte, abreuve ses convives (une jeune blonde et un type qui visiblement travaille dans la "tech") de son expérience de vie. Un moulin à égo-trip. Moi, moi, moi, je, moi, je.... Les autres écoutent poliment. Il entame alors un couplet sur ses expériences malheureuses en bourse. Parce que tu vois, lui il pèse et a bien fait savoir qu'il était un habitué de la Maison. C'est alors que l'autre boug, voulant apporter sa pierre à cette franche discussion (monologue plutôt) tente de l'interrompre et se voit rétorquer d'un ton sec et sans appel "ne m'interromps pas, JE termine". Que s'appelerio un gros con.
Alors que je m'apprêtais à commander un autre godet de vin, voilà que mon verre se remplit à nouveau "pour compenser de ne pas avoir eu du vin avec les praires". Exemplaire.
Mieux, quand mon plat arrive - Poulpe doré, bouillon lié à l'harissa - j'ai mes yeux ce gros qui brillent : un demi-poulpe de taille plus que respectable m'attend ! C'est beau ! C'est gros ! C'est un peu coûteux il est vrai (58€), mais je suppose que la chose a été pensée pour être partagée au moins à deux ! Je ne vais pas avoir besoin de reprendre un plat ! Youpi !
Et là, miracle de cuisine, de la gastronomie, du talent et des beaux produits : mon couteau s'enfonce tout seul dans le tentacule de l'octopode. Incroyable tendreté ! Je n'avais connu ça qu'à une seule reprise auparavant chez le regretté Adria. La sauce bien relevée est une merveille. Chaque bouchée me procure un plaisir orgasmique (et j'en rajoute à peine!). Une bonne claque qui m'a fait oublier que je n'avais pas eu mon accompagnement (à rajouter à en plus évidemment).
Voilà donc qu'arrive le Coeur de Laitue, poire poutargue. Un à côté qui coûte en plus 12€. Gloups. Heureusement, les poires fondantes et l'assaisonnement parfait de la salade rendent le tout délicieux avec l'iode des oeufs de poisson séché.
Mine de rien, je n'ai plus très faim. C'est rare ! Je re-sauce tout de même le plat.
J'opte malgré tout pour le dessert à 22€ : Tarte bourdaloue, glace aux noix. Là encore la portion s'avère généreuse. On ne le voit pas forcément sur la photo, mais ce dessert est de belle taille ! Facilement partageable. C'est opulent, frais et en aucun cas lourd. Miam intégral !
On oublie le café sans intérêt qui ressemble à du Nespresso (?) à 5€, et je demande l'addition : Boom ! 165€ pour ma pomme ! Mais franchement, rien que pour le poulpe, je ne regrette en rien ce super déjeuner ! Oui, j'ai bien mangé pour 2. Qu'est-ce que ça fait plaisir d'avoir ENFIN des portions à hauteur de son appétit sans avoir à prendre toute la carte ! Une étoile Michelin ne serait pas du vol, bien au contraire.
Vive restaurant mer
62 Av. des Ternes
75017 Paris (métro Ternes)
Tel : 01 42 94 07 90
Fermé le dimanche
Les +:
_ poulpe de folie, le meilleur ever !
_ des produits d'exception
_ des portions bien généreuses comme j'aime et promptes à être partagées
_ jolie carte des vins
_ service pro et chaleureux
Les -:
_ le café bof
_ pas d'amuse-bouche
_ ça peut paraître cher, mais j'ai bien mangé pour 2 personnes
_ la garniture à rajouter alourdit anormalement l'addition