J'avais adoré sa cuisine chez Mensae, il m'avait épaté lors de son intérim chez Korus, alors, sitôt ouvert son nouveau restaurant, je m'y précipite avec bonheur : Maxime Bouttier prend la place de Botanique et met la barre haute !
Par Arnaud Morisse
Bistrot de l'année en 2016, Mensae régalait les habitants du 19ème arrondissement. Le temps passe, et Maxime Bouttier monte en gamme en montant son restaurant gastronomique : Geosmine, du nom de cette molécule qui donne son goût si caractéristique à la betterave, s'est installé en lieu et place de Botanique qui a fermé ses portes. La déco a été revue, mais a été évidemment gardé cette fenêtre de sous-sol qui donne une vue zénithale sur la magnifique cave à vin.
Alors forcément, depuis le temps que je fréquente ce chef, je commence à le connaître, et ne suis plus un anonyme. Alors quand j'arrive, je suis bien accueilli et l'on me place directement au comptoir à l'étage, ma place préférée bien évidemment, devant la cuisine en activité. En sommellerie, c'est aussi une connaissance : Vincent travaillait chez Korus et a pu faire des extras chez Des Terres. Des adresses de qualité s'il en est ! Bref, j'attends beaucoup de ce dîner.
Le soir, deux menus en place : l'un à 108€ pour 8 services et l'autre à 139€ pour 11 étapes. Vous pensez bien que c'est le second qui me botte !
On démarre avec un cocktail de jus de fruit et légumes (carotte, orange...) avec des herbes et du piment d'espelette, histoire d'ouvrir l'appétit. Ensuite, une salaison de maquereau très bien balancée.
Et puis c'est l'heure de ma première "claque" : les amuse-bouche ou plus précisément la mini-tartelette à l'anguille fumée, herbes et fleurs. Le goût y est intense, puissant, les saveurs équilibrées, la texture idéale, et tout ça en une bouchée ! Le cromesquis de rillettes chaudes n'est pas mal non plus, même si je trouve cran au-dessous des "balls" de Pierre Lambert (si j'ose dire...). Enfin, les gressins charbonneux et la sauce à l'ail noir parachève cette entame de repas de la meilleure des manières .
Pour le vin, malheureusement, pas encore d'accord mets-vin disponible. Alors je me rabats sur une bouteille : saint-pourçain du domaine Grobot-Barbara, les Maltotes, excellent (59€).
Le premier plat a l'apparence du végétarisme. Mais que nenni ! Car les échalotes sont travaillée avec du gras : de poulet, du lard de colonnata le tout pour des bouchées d'une exceptionnelle gourmandise ! Le côté sucré du tubercule est conjugué au salé et au gras, autant dire qu'on est en plein goût de "reviens-y" ! J'adore !
Place à du "vrai" végétarisme avec l'Asperge verte, estragon, pistache, ail des ours. Si au premier abord, le côté ail des ours prend le dessus, on découvre de petits bonheurs avec le praliné pistache inséré cette sauce et surtout ces pistaches salées et torréfiées. Miam !
Avec le vin, ça cogne un peu c'est sûr, mais bon...
Le temps de goûter le pain de chez Graine fait sur mesure, avec le merveilleux beurre foisonné aux herbes, et ça continue !
Place ensuite à la patate. Bah oui, c'est bon ça la patate ! Ici j'ai le droit à de la Pomme de terre, curry, vin jaune, noix. C'est gourmand, croquant... mais ça manque de sel ! Avec un ch'ti rajout par-dessus, ça se passe beaucoup mieux !
Aujourd'hui, en guise de marée du jour, Lieu jaune, pissenlit, sauce tête, céleri. Le poisson offre une certaine fermeté, signe qu'il a été passé au sel. L'amertume qui se dégage du pissenlit me rappelle mon enfance. C'est très amer, puissant mais la sauce plus lactée relève le tout pour un finale de très haute volée.
Pour la viande, le chef travaille de la vache laitière normande qui a été abattue après 7 à 8 ans d'élevage (vs plus de 10 en général), et qui a été maturée. Ce Faux-Filet de vache maturée, radiccio, sauce BBQ est tout simplement une merveille. Une nouvelle fois l'amertume s'équilibre parfaitement avec la sauce intense et un peu sucrée. Wahou !
J'opte pour un verre de vin rouge en plus évidemment pour accompagner ce bonheur : un cot de Mickael Bouge (en vallée de la Loire). 16€ le verre (ouch!).
Tiens? On me salue : Pierre-Louis, client de Caboulot et ami est venu dîner aussi ici. Il faut dire que je lui avait refilé le tuyau !
C'est le plat "signature" ensuite en guise de point d'orgue : Mamelle de vache, caviar, crème et algues. Oui, oui, vous avez bien lu "mamelle" ! Un abat rare mais pourtant savoureux. Ici cuit longuement puis saisi, il dégage des saveurs animales délicieuses. Autant dire qu'avec les algues et le caviar (Sturia), le tout lié avec de la crème, on obtient une alliance Terre/ Mer du tonnerre ! Chapeau !
Après toutes ces émotions, retour sur terre avec la partie sucrée : Citron, sauge, beurre noisette, céréales. Voilà du frais, du digeste, de l'agréable.
Ensuite, Pomme, sarrasin, caramel beurre salé, lait poivre. Des alliances plus classiques quoique : le poivre bien présent rajoute un pep's bienvenu. Peu sucré en moyenne, ce dessert dépote dès que l'on déniche une pointe de caramel au beurre salé.
On termine par un 3ème dessert, déjà goûté chez Mensae : pomme, sarrasin, caramel au beurre salé, lait poivre - chocolat, vanille, fleur de sel, praliné. Moi qui ne suis pas fan de chocolat, je finis sans peine le bol servi !
Maintenant, c'est l'heure de la douloureuse : 209€. Ils m'ont fait payé l'ancien tarif du menu (129 € VS 139€) car il y avait une erreur d'impression sur la feuille. Bref, ce Geosmine, à peine ouvert se trouve bien chez lui. On retrouve avec bonheur la cuisine de caractère du chef Maxime Bouttier qui a les moyens de mettre en oeuvre ses idées originales ! Bref, je ne peux que recommander chaudement de s'y presser avant que ce ne soit complet midi (menu à la carte) et soir.
Geosmine
71 Rue de la Folie Méricourt
75011 Paris (Métro Parmentier)
tel : 09 78 80 48 59
Fermé le mardi et le mercredi
Les +:
_ une cuisine puissante, ciselée et originale
_ des vins rudement bien choisis
_ une ambiance conviviale et sans chichi
Les -:
_ eau micro-filtrée facturée à 5€